Disposer de sa propre piscine est un luxe qui se démocratise. Mais encore faut-il l’exploiter avec soin pour que la baignade ne vire pas au bouillon de culture. Car, contrairement aux installations publiques, aucun organe de contrôle ne vient vérifier la qualité de l’eau. En partenariat avec l’émission On en Parle (RTS-La Première), nous avons voulu découvrir si les Romands se baignent dans de bonnes conditions d’hygiène. Pour ce faire, nous avons prélevé, à la fin de l’été passé, quinze échantillons d’eau chez des propriétaires choisis aléatoirement. Nous avons confié ces prélèvements au chimiste cantonal de Genève, Patrick Edder, qui a fait une analyse microbiologique et nous a aidés à interpréter les résultats.
Notre coup de sonde est sans appel: peu de piscines privées sont correctement entretenues: deux sur quinze! Neuf ont tout simplement été jugées impropres à la baignade, tandis que quatre n’étaient pas suffisamment traitées.
Six bassins remplis de germes
Sur les neuf échantillons incriminés, six l’étaient en raison d’une surabondance de germes aérobies mésophiles (GAM). Alors que la limite dans les établissements publics est fixée à 1000 UFC (Unité formant une colonie) par ml, les six en contenaient plus de 3000. Un bassin dépassait même les 12 000 UFC/ml! Ces bactéries ne sont, heureusement, pas pathogènes et ne représentent pas un danger pour la santé. Mais leur présence excessive indique un traitement insuffisant. D’ailleurs, trois des six échantillons étaient contaminés par d’autres micro-organismes plus problématiques.
Dans deux piscines, des colonies de pseudomonas ont été décelées. Ces germes, très résistants, sont particulièrement néfastes pour les voies respiratoires et les oreilles, où ils peuvent causer des infections. Quand ils sont nombreux, ils forment parfois des biofilms contre les parois du bassin. Pour s’en débarrasser, il faut sortir l’épuisette et l’aspirateur, faire un «chlore choc» (traitement disponible dans les commerces) et renouveler une partie de l’eau.
Le laboratoire du chimiste cantonal a également décelé la présence de bactéries E. coli dans un échantillon. Provenant de diverses sources, dont les déjections d’oiseaux, ces germes fécaux sont susceptibles de provoquer, entre autres, des diarrhées. Un renouvellement de l’eau est, dans ce cas, primordial.
Trois piscines trop chlorées
Le remède classique à la prolifération de ces micro-organismes néfastes dans l’eau est le chlore. C’est d’ailleurs le traitement utilisé en très grande majorité par les propriétaires qui ont participé à l’enquête. En prélevant les quelques décilitres destinés au laboratoire, nous en avons alors profité pour analyser la concentration de chlore. Celle-ci ne peut, en effet, être vérifiée que sur place. Le taux idéal se situe entre 0,2 et 0,4 mg/l, avec une tolérance jusqu’à 0,8 mg/l. Pour les établissements publics, un dépassement de ce plafond équivaut à une fermeture jusqu’au retour à la normale. Sur les quinze bassins, trois étaient trop chlorés. Un l’était même très nettement au-delà de la limite, avec une valeur de 3 mg/l. A noter que l’unique piscine traitée à l’électrolyse au sel avait, elle aussi, une teneur trop élevée, à 2 mg/l.
Une concentration excessive de chlore pose différents problèmes. Sur le court terme, elle est surtout irritante pour la peau. Mais cette abondance favorise également la formation de sous-produits de la chloration. Sur le long terme, une exposition respiratoire ou cutanée à ces derniers est cancérigène.
Une bonne nouvelle enfin: le taux d’acidité ou d’alcalinité (pH) de tous les échantillons était dans la zone de tolérance, entre 6,8 et 7,6. Un pH trop ou pas assez élevé peut, en effet, être irritant pour la peau et les muqueuses des baigneurs. Son équilibre assure, en outre, un meilleur maintien de la teneur en chlore.
Entretien régulier exigé
Les propriétaires de piscines chauffées doivent être particulièrement attentifs au traitement de leur eau. Car, plus les températures sont élevées, plus le développement de bactéries est grand. Sur les cinq installations chauffées que nous avons analysées, deux en avaient d’ailleurs trop. L’une contenait des pseudomonas.
Il est intéressant de constater que quatre bassins n’étaient pas suffisamment chlorés sans, pour autant, avoir développé une surabondance de germes. A l’inverse, deux échantillons avaient un niveau de chlore idéal sans parvenir à se débarrasser de ses populations de GAM ou de pseudomonas. Preuve qu’un traitement adéquat n’est pas suffisant: pour faire trempette en toute quiétude, un nettoyage régulier et l’application de quelques conseils pratiques sont essentiels (lire ci-contre).
Bernard Utz
Conseils d’entretien
Nettoyage
⇨ Enlever les feuilles et les insectes à la surface à l’aide d’une épuisette.
⇨ Utiliser un balai ou un aspirateur pour les saletés logées au fond de la piscine.
⇨ Renouveler environ un tiers de l’eau de la piscine chaque année. La changer complètement tous les quatre à cinq ans.
⇨ Il existe différents filtres (à cartouche, à sable, etc.). En fonction de chaque modèle, il est important de respecter ce que préconise le fabricant pour son entretien (nettoyage, détartrage, etc.) et son renouvellement.
Chlore et pH
⇨ Contrôler chaque semaine les taux à l’aide des pastilles de test. Celui du chlore devrait idéalement se situer entre 0,2 et 0,4 mg/l, celui du pH entre 7 et 7,4.
⇨ Bien stocker le chlore au frais et au sec. Quand il est entreposé trop longtemps ou dans un local inadéquat, des chlorates toxiques peuvent se former. Raison pour laquelle il ne faut pas faire de grandes réserves.
Utilisation
⇨ Avant de se baigner: prendre une douche et mettre un bac pour se rincer les pieds avant d’entrer dans l’eau
⇨ Après la baignade: couvrir si possible la piscine.
Régularité
⇨ Les conseils donnés sont valables en tout temps. Il est important de traiter et de nettoyer sa piscine régulièrement et pas uniquement avant de piquer une tête.