Parking d’une grande surface, 18 h 00. Un automobiliste handicapé s’approche des places qui lui sont réservées. Et repart, dépité: elles sont toutes occupées. Peu après arrive un homme au pas vif, qui s’engouffre dans sa voiture et démarre.
Cette situation, toutes les personnes souffrant d’un problème de mobilité l’affrontent quasi quotidiennement. Les places de parc pour handicapés, situées près des commerces, sont systématiquement prises d’assaut par des clients pressés qui ne possèdent pas de macaron les autorisant à y stationner (voir encadré).
Enquête sur le terrain
Cinq enquêteurs de Bon à Savoir et On en parle (RSR) ont voulu constater le problème par eux-mêmes. Ils ont choisi dix parkings situés dans des lieux de passage – grandes surfaces, postes, gares – à Genève et Lausanne. Sur chacun, ils ont surveillé les places de parc pour handicapés durant quatre heures consécutives. Ils ont noté le nombre de voitures qui s’y arrêtaient, leur temps de stationnement et si elles avaient un macaron.
Amendes salées
Cette mini enquête n’a pas de valeur statistique, mais elle donne déjà des résultats intéressants: lors de la surveillance, près de deux personnes sur trois ont occupé une place pour handicapés sans en avoir l’autorisation. Temps moyen de stationnement: 15 minutes. Il y a ceux qui vont «juste faire une course», ceux qui attendent un ami, les livreurs qui ne trouvent pas d’autres places assez larges. On a même vu un moniteur d’auto-école utiliser l’espace pour enseigner les subtilités du parcage à son élève...
«Pour les personnes handicapées, il est pourtant essentiel d’avoir accès à ces places, souligne Daniel Joggi, président de l’Association suisse des paraplégiques. Elles sont plus larges, ce qui permet d’ouvrir totalement la porte et de sortir une chaise roulante à côté de la voiture.»
Le problème, c’est que le contrôle n’est pas encore assez sévère. Il existe en effet deux sortes de places: celles situées sur un terrain municipal, donc publiques, surveillées par la police qui amende immédiatement le resquilleur. Et les privées, souvent placées devant un commerce qui doit mettre en place son propre système de surveillance.
Les contrôleurs privés dénoncent les abus au juge de paix, qui envoie une amende au contrevenant. Soit 120 fr., plus 30 fr. de frais administratifs. Mais beaucoup de magasins ne pensent pas à effectuer des contrôles ou craignent les réactions des resquilleurs. Certains parlent même de «contrôles galère», et préfèrent utiliser les services de Securitas.
Solution au problème
Lors de notre enquête, seuls trois endroits sur les dix ont été inspectés, l’un par un policier avec amende à la clé, les deux autres par des surveillants qui ont laissé un feuillet. Sur celui-ci, un avertissement: «Vous êtes sur une place réservée, nous avons relevé votre numéro de plaque et sévirons en cas de récidive.» Fait intéressant, lors de l’enquête, le nombre de fraudeurs a été considérablement moins important dans ces trois parkings que dans les autres. Il semble donc qu’une simple mise en garde suffise à écarter les fautifs. Et à rendre aux personnes handicapées les places qui leur sont dues.
Véronique Kipfer-Egloff
d’un canton à l’autre
Où et comment obtenir un macaron
Selon la norme définie par la commission intercantonale de circulation routière, toute personne en chaise roulante ou présentant des problèmes de mobilité peut demander un macaron. Celui-ci lui donne le droit de se parquer sur les places pour handicapés et, selon les cas, de dépasser la durée de parcage autorisée sur la voie publique. Néanmoins, chaque personne entrant dans le cadre de cette norme est tenue de procéder de la manière suivante:
— Elle doit s’adresser à l’autorité compétente. Soit, la plupart du temps, la police municipale, sauf dans les cas évidents d’handicap (véhicule modifié, par exemple) où c’est la police cantonale qui délivre l’autorisation lors de la course de contrôle.
— Elle doit pouvoir prouver qu’elle a réellement besoin de ce macaron. Pour ce faire, elle doit généralement présenter un certificat délivré par son médecin traitant ou, parfois, par un médecin officiel désigné par l’autorité.
Deux points importants:
• Si la norme définit des limites précises, la police municipale peut néanmoins prendre des décisions au cas par cas. Elle peut ainsi délivrer un macaron à durée déterminée, estimer que des béquilles n’empêchent pas la mobilité de quelqu’un, etc.
• Les conducteurs qui accompagnent la personne handicapée peuvent bénéficier eux aussi d’une carte
de «conducteur accompagnant». Celle-ci est accordée sur présentation d’un certificat signé par le centre de soins concerné ou, dans le cas de privés, par un médecin traitant.