Le tiers des poissons et des fruits de mer consommés en Suisse aujourd’hui provient de l’aquaculture. Les consommateurs espérant combattre par ce biais la surpêche doivent toutefois déchanter: l’élevage intensif pratiqué dans les fermes piscicoles perturbe l’écosystème, sans parler des conditions de travail précaires des employés.
Si les poissons sauvages pêchés selon certaines règles strictes sont certifiés par le Marine Stewardship Council (MSC, lire BàS 6/2008), rien de tel ne guide le consommateur dans son choix de produits d’élevage, comme le pangasius, les crevettes, etc. Certes, il existe des poissons d’aquaculture certifiés bio provenant d’exploitations à faible densité, mais ce marché est trop confidentiel pour satisfaire les besoins croissants des consommateurs.
C’est la raison pour laquelle les milieux concernés (éleveurs, importateurs, instances dirigeantes et écologistes) élaborent un label spécifique: l’Aquaculture Stewardship Council (ASC). Dès 2011, il fixera les règles du jeu pour les fermes piscicoles, comme c’est déjà le cas pour la pêche. En voici les grandes lignes.
- Nourriture – Pour nourrir un kilo d’individus d’élevage, il faut en moyenne 4 kilos de poissons. Afin d’éviter la surpêche d’anchois, sardines, maquereaux et autres harengs, le standard ASC exige que les poissons d’élevage soient nourris avec les restes de la pêche destinée à la consommation humaine (têtes, queues) ou avec des animaux eux-mêmes certifiés MSC.
- Ecosystème – Les restes de nourriture et les déjections des poissons d’élevage finissent au fond de l’eau, détruisant toute vie aquatique. Le label ASC exige que les exploitants garantissent la qualité de l’eau et plafonnent la densité des élevages.
- Traitement des poissons – L’usage d’hormones et de médicaments est réglementé par le standard ASC. Ce dernier interdit l’ajout de colorants et d’arômes et limite le recours aux agents conservateurs.
- Biodiversité – Le label ASC interdit le prélèvement de poissons sauvages destinés à améliorer les espèces ainsi que le recours au génie génétique.
Il exige que les élevages soient parfaitement fermés, afin que les pensionnaires ne puissent s’échapper et se reproduire à l’extérieur, au détriment du milieu indigène qui régresse face l’envahisseur. - Conditions sociales – Pour être certifiées, les fermes doivent offrir des conditions de travail adéquates, en particulier aux femmes et aux enfants, dont le travail sera régi d’après les conventions internationales.
Selon les espèces
Chaque espèce aura son propre standard ASC. Celui du tilapia (carpe exotique très demandée) est déjà sous toit et celui du pangasius en voie d’achèvement. Suivront, d’ici à 2011, les crevettes, les truites, le saumon, les moules et les huîtres. Ces standards seront actualisés tous les quatre ans.
Les poissons étiquetés ASC devraient coûter un peu plus cher, entre 10% et 20%, selon les premières estimations. A ce prix-là, le consommateur aura, outre le fait de pouvoir déguster des oméga 3 en toute bonne conscience, le plaisir de la bonne chère. Car un saumon engraissé dans un aquarium surpeuplé n’a pas le même goût qu’un animal évoluant dans un bassin approprié à sa taille.
Claire Houriet Rime
CONSEILS PRATIQUES
Choisir les «bons» poissons
Manger du poisson sans piller les mers, c’est possible. Le WWF offre en exclusivité aux lecteurs de Bon à Savoir le guide d’achats «Poissons & fruits de mer» (collé ci-dessus). On y trouve les espèces conseillées ou, au contraire, à éviter*.
Les critères de recommandation prennent en compte les méthodes de pêche, l’importance des prises accidentelles, la destruction des fonds marins et la mise en œuvre des quotas de pêche.
Et, surtout, on ne consommera du poisson qu’occasionnellement, en préférant la production locale.
Dans l’idéal, le poisson sauvage doit afficher le label MSC et, celui d’élevage, l’appellation bio ou, dès qu’il apparaîtra sur les étals, le label ASC.
*Liste complète sur wwf.ch/poisson