En 2013, la rente de l’AVS varie entre 1170 fr. et 2340 fr./mois pour une personne seule, mais entre 1755 fr. et 3510 fr./mois seulement pour un couple marié.
Vivre avec 1755 fr. pour deux, alors que, dans une grande ville, le moindre 2 pièces revient, aujourd’hui, entre 800 fr. et 1500 fr. et qu’il n’est plus possible de s’assurer contre la maladie pour moins de 600 fr., inutile de préciser que c’est mission impossible. Heureusement, les rentes du 2e pilier et l’épargne individuelle complètent le plus souvent cette manne minimale. Il n’empêche: 179200 personnes, soit 12% des pensionnés AVS, faisaient appel, à la fin de 2011, aux prestations complémentaires. Si l'on y ajoute les 108500 personnes qui bénéficiaient d’une prestation de l’AI, cela représente 287 700 rentes pour un total de près de 2 milliards de francs par an.
Un droit constitutionnel
Ces prestations complémentaires (PC) ne sont pas une aumône accordée à bien plaire, mais un droit dûment inscrit dans la Constitution. Elles ne sont, toutefois, pas attribuées automatiquement: il faut expressément les demander, ce que – aujourd’hui encore – des retraités ne font pas, parce qu’ils ne sont pas au courant ou qu’ils n’osent pas.
Or, pour autant qu’ils bénéficient d’une rente AVS (même en cas d’anticipation) ou AI* et qu’ils soient Suisses ou membres de l’UE domiciliés en Suisse (ou qu’ils y vivent depuis plus de dix ans sans interruption pour les autres étrangers), ils peuvent toucher la différence entre ce qu’il faut considérer comme les besoins essentiels et les revenus, mais parfois aussi le remboursement des frais de maladie et d’invalidité (lire encadré).
Un calcul assez long
On s’en doute: il n’est pas facile de déterminer à quoi correspondent les besoins essentiels. Pour le calculer, il faut d’abord distinguer les personnes qui vivent à domicile (considérées dans cet article) de celles qui sont pensionnaires dans un home (qui feront l’objet d’un autre article dans notre prochaine édition).
Il est possible d’évaluer si elles ont droit, oui ou non, à une PC, mais le calcul reste malheureusement approximatif, car les critères dont il faut tenir compte ne peuvent pas toujours être généralisés. Nous avons, cependant, mis au point un calculateur, tant pour les locataires que les propriétaires. S’il ne permet pas de garantir le montant exact de la PC, il est suffisamment précis pour adresser une demande officielle en cas de réponse positive.
Exemple concret
Prenons l’exemple d’un couple jurassien, sans enfant à charge, habitant tous deux leur appartement de 3,5 pièces acheté, en 2003, à Delémont.
Sa rente AVS n’est pas complète, puisqu’elle se monte à 38120 fr. (1), mais elle est complétée par une maigre prestation du 2e pilier (2) et un petit revenu lucratif (3), dont on ne retient que les deux tiers une fois les frais déduits (4) et (5).
En ajoutant le revenu de la fortune (ici, intérêt de 0,5%) (6) et la valeur locative de l'appartement (7), on obtient le montant des revenus (8).
Le calcul de la fortune est plus ardu. A la fortune mobilière (9), il faut d’abord ajouter les éventuelles donations faites à des proches. Ici, notre couple a offert 35 000 fr. (10) à son enfant en 2008 (11), mais, par le jeu des déductions (10 000 fr./an dès la 2e année), l’ardoise est à zéro (12).
Pour la fortune immobilière, puisqu’ils sont propriétaires, on déduit de la valeur fiscale de l’appartement (13) un forfait de 122 500 fr. (300000 fr. si l’un des membres du couple vit dans un home) (14), pour arriver à 167 500 fr. (15).
Puis, on soustrait l’éventuelle dette hypothécaire (17) et une franchise de 60 000 fr. (37 500 fr. pour une personne seule) (19) pour obtenir la fortune avant l’imputation (20), de 550 fr. dans notre exemple (21).
Total des revenus: 56 727 fr. (22).
Les dépenses
Les dépenses sont plus simples à calculer. La Confédération a estimé que la couverture des besoins vitaux se montait à 28 815 fr. (23) pour un couple, 19 210 fr. pour une personne seule, plus lorsqu’il y a des enfants à charge. A cela s’ajoute un forfait pour l’assurance maladie, variable d’un canton à l’autre (24). Les propriétaires ont le droit d’ajouter la valeur locative (qui a été retenue dans leur revenu) + un forfait de 1680 fr. (25) (1500 fr. pour les locataires) ainsi que leurs frais immobiliers (entretien et intérêts hypothécaires) (26). Total des dépenses: 60 691 fr. (27).
A priori, notre couple a donc droit à des prestations complémentaires, puisque ses dépenses sont supérieures à ses revenus (28). Comme elles intègrent au moins le subside automatiquement accordé pour l'assurance maladie obligatoire, elles vont donc se monter à 9696 fr. par an (29), ou 808 fr. par mois.
Faire la demande
Dès lors, notre couple doit remplir et retourner le formulaire officiel qu’il trouvera (ou se fera envoyer par pli postal) sur le site internet de sa Caisse cantonale de compensation (Genève: Service des prestations complémentaires). Toutes les adresses et les mementos sont joints à notre calculateur. Si la PC est acceptée par une décision écrite (avec droit de recours), elle entrera en vigueur le premier jour du mois où elle a été déposée.
*Le même droit est valable, notamment, pour les personnes bénéficiant d’une allocation pour impotent de l’AI (dès 18 ans) ou qui ont touché une indemnité journalière de l’AI pendant six mois au moins.
Christian Chevrolet
Bonus web:calculez si vous avez droit à une PC
Pour télécharger le tableau comparatif, se référer à l'encadré au-dessous de la photo.
Remboursement d’autres frais
En plus de la prestation complémentaire versée sous forme de rente, les personnes au bénéfice d’une PC peuvent obtenir le remboursement de certains frais dus à la maladie ou à l’invalidité, pour autant qu’ils ne soient pas pris en charge par une autre assurance. Cela concerne:
- la participation aux coûts dans le cadre de l’assurance maladie, jusqu’à concurrence de 1000 fr. par an et par personne, ce qui correspond à la franchise minimale et à la quote-part maximale;
- les traitements dentaires («simples, économiques et adéquats»);
- l’aide de soins et d’assistance à domicile ou dans des structures de jour;
- le transport vers le lieu de soins le plus proche;
- le coût de moyens auxiliaires, comme un lit électrique;
- les séjours de convalescence ou dans une station thermale prescrits par un médecin.
L’enveloppe totale est limitée à 25 000 fr. par personne (50 000 fr. par couple) et par an, mais les cantons peuvent fixer des montants plus élevés. C’est de toute façon le cas lors d’impotence moyenne à grave (jusqu’à 90 000 fr.). Dans les cas où aucune PC annuelle ne peut être versée, les frais de maladie et d’invalidité peuvent néanmoins être remboursés s’ils entraînent un excédent des dépenses par rapport aux revenus.
Enfin, les bénéficiaires d’une PC sont également exonérés du paiement des redevances pour la radio et la télévision. Mais ils doivent en faire la demande écrite à Billag, en joignant une copie de l’attestation d’octroi d’une PC rédigée par la Caisse de compensation.
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