Voilà dix ans que la Confédération nous réserve, année après année, de «bonnes surprises». Car, que le Conseil fédéral annonce un bénéfice ou un déficit (1re colonne du tableau 1), parfois allégé, d’autres fois alourdi par le Parlement ou des besoins intermédiaires (2e colonne), les comptes se révèlent systématiquement meilleurs que prévus (3e colonne). Et pas de peu, puisque, entre 2004 et aujourd’hui, le Parlement a accepté un déficit ordinaire cumulé de 6 milliards de francs, qui s’est transformé, au final, en bénéfice de 21,1 milliards.
Et 27 milliards de différence, c’est quand même énorme! Et encore, on ne vous parle que des recettes et des dépenses ordinaires… Car, si l'on compare les prévisions incluant les données extraordinaires (tableau 2), l’erreur des prévisions passe à 35 milliards.
Et ça continue…
Les bonnes nouvelles risquent d’ailleurs de se poursuivre, étant donné que, cette année encore, alors qu’on escomptait un déficit de 450 millions, les estimations officielles laissent entrevoir un bénéfice de 800 millions (tableau 1). Ajoutez à cela les gains confisqués à UBS dans le cadre de l’affaire Libor et nous voilà même à 860 millions (tableau 2).
Quant au budget de 2014, il sera, comme d’habitude, débattu au Parlement lors de la session d’hiver. Le Conseil fédéral prévoit un «léger» déficit de 109 millions de francs: le suspense est intense.Puis, l’optimisme s’installe durablement, puisque les projections, même lointaines, alignent une succession de bénéfices: 167 millions en 2015, 538 millions en 2016 et 1,37 milliard en 2017.
Reprise inattendue
Comment, toutefois, arrive-t-on à de pareilles abîmes entre l’établissement du budget et les comptes finaux? Prenons, par exemple, les prévisions et les résultats de l’année 2010, où le déficit ordinaire de 2 milliards s’est transformé en bénéfice de 3,6 milliards. Qu’en dit la Confédération? Qu’elle a été surprise par «la vigueur inattendue de la reprise économique en Suisse». Le budget a, en effet, été fondé, en été 2009, sur l’hypothèse d’une forte récession, suivie d’une reprise hésitante en 2010. Or, tout est allé beaucoup plus vite que prévu, puisque l’évolution du produit intérieur brut (PIB), budgeté à –0,4% s’est finalement monté à +2,6%. Et bingo: 5,6 milliards en sus!
Réduction de la dette
Du coup, la dette de la Confédération, après être montée de 38,5 milliards de francs (en 1990) à 130,3 milliards en 2005, est redescendue, l’an dernier, à 112,4 milliards, le niveau qu’elle avait au début du siècle. Ce qui reste beaucoup, évidemment, mais, au vu des projections pour les années à venir, la situation n’est pas «pire que jamais», comme on l’entend souvent dire!
Christian Chevrolet
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