En 1984 déjà, le Tribunal fédéral a jugé inadmissible que la différence entre les impôts payés par un couple marié et ceux par deux concubins dépasse 10%. Il a, cependant, fallu attendre plus de 20 ans pour que la Confédération réagisse avec un premier paquet de mesures, réduisant, dès 2008, l'injustice pour 160 000 des 240 000 couples concernés. La consultation pour le deuxième paquet s'est achevée le 5 décembre dernier et se trouve actuellement en phase de dépouillement.
En attendant, la situation diffère considérablement selon la situation financière et familiale du couple, mais aussi – comme toujours lorsqu'il s'agit d'impôt – selon le canton de domicile.
Prenons l'exemple moyen d'un couple de trentenaires bénéficiant d’un revenu mensuel brut de 8160 fr. Il gagne 4500 fr. (x 13), elle 5700 fr. (idem) et ils ont un peu de fortune (lire le scénario précis dans tableau A). Dans leur cas, il n’y a que Fribourg et Lausanne qui soient (presque) impartiaux. A Bienne et à Sion, en effet, le couple a intérêt à se marier, au contraire de Genève, de Delémont et de Neuchâtel, où les concubins sont favorisés, mais dans une mesure raisonnable (différence de 4,7% au plus).
La situation est, en revanche, très différente avec de la descendance. Prenons le même couple de trentenaires, avec un revenu à peu près identique (lire le scénario précis dans tableau B), mais réparti différemment, car il inclut la pension alimentaire des deux enfants issus d’un premier mariage et dont Madame a la charge. Alors qu’il y a très peu de différence à Bienne, à Lausanne et à Sion, le couple a réellement intérêt à rester en concubinage ailleurs, puisqu’il va payer presque la moitié plus en passant devant le maire genevois!
Petits et gros revenus
Les choses ne s’arrangent guère avec des revenus plus importants. En doublant le salaire de nos trentenaires (ce qui donne un revenu mensuel brut dépassant 16 000 fr.), le concubinage est préférable dans tous les cantons, avec des différences assez similaires (entre 7,2% et 9,5% avec notre scénario*).
Mais, à l’inverse, le mariage retrouve de l’attrait pour les petits revenus. En ramenant le salaire brut de notre exemple à un total de 6300 fr.*, il n’y a plus que Neuchâtel et, dans une moindre mesure, Delémont, pour favoriser le concubinage. Partout ailleurs, les époux seront gagnants, jusqu’à 10% à Bienne et à Sion.
Enfin, le mariage est incontournable lorsqu’un des deux membres du couple ne travaille pas. En reprenant le premier scénario de nos trentenaires (décrit dans le tableau A), mais en décidant qu’une seule personne (peu importe, Madame ou Monsieur) gagne la totalité du revenu, les époux vont payer de 18% à 52% en moins que les concubins*.
En francs comptants
Cela dit, il ne faut pas se focaliser sur les réductions exprimées en pour cent, mais aussi évaluer la taxe finale, à payer en francs comptants. Exemple: dans le cas précis du tableau B (couple avec enfants), les époux valaisans paient, certes, 3,1% de plus que les concubins, mais leur charge fiscale se limite à 4473 fr., contre 8361 fr. à Bienne qui leur offre pourtant une réduction de 1,9%...
Christian Chevrolet
Bonus web:au nom du maire, du fisc et du libre esprit
Pour télécharger le tableau comparatif, se référer à l'encadré au-dessous de la photo.