Brigitta Trachsel de Zollikofen, est très sportive. Mais cette porteuse de verres de contact avait sans cesse des poussières dans l’œil lorsqu’elle faisait du vélo ou du jogging. Pour y remédier, elle vient d’adopter des lentilles de nuit. Elle les porte durant son sommeil, les enlève le matin et fait du sport sans avoir à se préoccuper de sa vue.
Fonctionnement
Le principe de cette technique, encore méconnue en Suisse, est simple: l’opticien utilise un kératographe pour mesurer la courbure du globe oculaire au centième de millimètres près. Le moulage exact est reporté sur la face interne d’une lentille de contact dure. Dès le premier port, celle-ci effectue une pression sur la cornée de sorte que l’œil s’adapte à la forme de la lentille durant la nuit. Le patient devrait bénéficier ainsi d’une vue nette durant 48 heures environ. Après, l’œil modelé reprend sa forme première.
Raymond E. Wälti, à Thoune, est l’un des premiers opticiens suisses à s’être intéressé à l’ortho-kératologie (litt.: rééducation de la cornée). «Les lentilles de nuit sont destinées à tous ceux qui désirent voir net durant la journée», explique-t-il. Avec un bémol, toutefois: seules les personnes souffrant d’une myopie atteignant un maximum de -5 dioptries peuvent les utiliser. Ceux qui sont plus myopes et les presbytes ne peuvent pas en bénéficier.
Au début, les lentilles doivent être portées chaque nuit durant six heures au moins, puis durant trois à quatre heures. Sous peine de ne percevoir aucun résultat.
Il y a peu de risques de perdre ces verres. Mais ils coûtent bien plus cher que les modèles de jour (entre 600 fr. et 700 fr.). En effet, les premiers mois, les lentilles vont être remplacées graduellement par d’autres plus plates. L’adaptation revient entre 800 fr. et 1500 fr., selon la correction à effectuer et le rythme de changement de l’œil. Mais une fois les lentilles perfectionnées, le client peut les garder deux à trois ans. En sus, il faut compter le prix des produits de conservation et de nettoyage. Au total, retrouver sa vue d’antan revient donc à environ 2000 fr. au moins.
Traitement à vie
«C’est un traitement à vie, explique Isabelle Jumetz, opticienne diplômée chez Visilab, à Lausanne. En effet, il suffit à un adulte de ne pas porter ces lentilles durant quelque temps pour que tout redevienne comme avant. Et cela demande une grande adaptation de la part du client, car il faut pouvoir assurer un suivi constant les premiers mois.»
Autres points négatifs: les premiers jours, la pression sur le globe est si forte qu’elle
empêche de dormir. Et il faut environ un mois pour obtenir une netteté visuelle optimale. Durant cette même période, il faut s’attendre à des problèmes de vision au crépuscule. «Pour ma part, souligne Isabelle Jumetz, je ne propose pas spontanément ce traitement. Ce sont les clients qui me le demandent.»
Le spécialiste des lentilles de contact Hermann Anhalm, de la clinique ophtalmique Pallas à Olten, estime que «seuls des spécialistes ayant une grande expérience des verres de contact rigides peuvent effectuer une adaptation correcte».
Les médecins, de leur côté, restent prudents quant aux inconvénients inhérents au port de verres de contact nocturnes. Risques d’irritation et de griffures de la cornée, pendant les phases de sommeil où les yeux roulent sans arrêt dans l’orbite, humidité réduite de l’œil, ignorance des effets possibles à long terme sont quelques-unes de leurs critiques. A quoi s’ajoutent les problèmes habituels engendrés par le port de verres de contact, tels que la sécheresse oculaire, le risque d’infection et l’éclatement de vaisseaux.
Pirmin Schilliger / vke