Trois milliards entre 2009 et 2015: telle est la somme payée en trop par les Suisses qui téléphonent depuis l’étranger, par rapport à ce que paient leurs voisins. Les chiffres parlent d’eux-mêmes: depuis juillet 2014, le coût d’une minute de communication sans fil d’un pays de l’Union européenne à l’autre est plafonné à 20 ct. Vers la Suisse, le consommateur paie 45 ct. chez Swisscom (+ 125%) et 1.30 fr. chez Sunrise. Chez Salt, le nouveau nom d’Orange, la minute coûte toujours 1.70 fr. (+ 750%); l’opérateur proposera néanmoins une nouvelle gamme d’abonnements «Pass» à partir du 1er juin.
Ce mois de mai marque le 4e anniversaire de la pétition «Stop aux prix abusifs du roaming!», lancée par Bon à Savoir en 2011 et signée par plus de 56 000 consommateurs. A l’époque, la minute de roaming était surfacturée de 55% à 265% par nos trois opérateurs par rapport à leurs homologues européens. Quatre ans plus tard, la situation a donc empiré! Mais elle semble peu préoccuper le Conseil des Etats: le 9 mars dernier, il a rejeté la motion Wyss, qui réclamait un plafonnement des tarifs d’itinérance. Les baisses de prix annoncées par les opérateurs et les nouveaux abonnements «roaming inclus» ont, semble-t-il, suffi à convaincre la Chambre haute de la rejeter. Mais les prix ont-ils suffisamment chuté? Pour le savoir, nous avons simulé la facture reçue par un abonné qui utilise modérément son natel en vacances (voir encadré «Comment lire notre tableau»).
Le «tout compris» trop cher
«Les frais d’itinérance? Du passé!» C’est ce que suggéraient les arguments publicitaires lors du lancement des premiers abonnements «roaming inclus». En réalité, on en est loin: ces offres n’incluent aucun pays situé hors de l’Europe*. Mais aussi et surtout, parce que seuls les contrats les plus coûteux sont concernés: avec 30 jours d’itinérance inclus, la formule la meilleur marché coûte ainsi 59 fr./mois chez Swisscom (voir tableau 3), soit 708 fr. par an. La barre des 1000 fr. par an est presque atteinte chez Salt (83.25 fr./mois, sans trafic de données) et franchie chez Sunrise (100 fr./mois). Elles sont donc sans intérêt pour les utilisateurs qui ne voyagent qu’occasionnellement à l’étranger: le surcoût de l’abonnement risque, en effet, de dépasser les frais d’itinérance.
Selon nos calculs, un client sans abonnement roaming paiera, ainsi, entre 23.40 fr. et 77.75 fr. s’il emporte son mobile pendant ses vacances en Europe et l’utilise modérément (voir tableau 1). Pas donné, mais pas encore assez pour qu’un contrat avec roaming inclus devienne avantageux. Hors d’Europe, la situation est pire: la facture varie de 55.50 fr. à 404 fr. (Sunrise) pour la même utilisation. Et là, aucun forfait «roaming inclus» ne permet de faire baisser la note, puisque ceux-ci ne sont pas valables hors du Vieux-Continent.
Options roaming: du mieux!
Pour convaincre leurs clients de téléphoner tout de même depuis l’étranger, les opérateurs ont mis sur le marché des «options roaming»: contre un supplément mensuel, ils peuvent appeler ou utiliser des données pour un prix plus doux. Ces options valent-elles le coup? Tout dépend du pays et de l’utilisation: avec notre scénario d’utilisation modérée du téléphone, on constate que la facture baisse avec Swisscom, mais de quelques francs seulement. Signalons toutefois que les tarifs de base de l’opérateur national sont les moins chers des trois.
Du côté de Sunrise, la diminution est plus sensible: en activant les bonnes options, on peut faire passer sa facture de 55.50 fr. à 30.40 fr. en Europe et aux Etats-Unis. Dans ce domaine, Salt est le champion toutes catégories: dans quatre des six pays, il possède à la fois la palme du prix le plus cher sans options, et du plus avantageux avec! C’est le seul qui permet d’emporter son téléphone au Japon ou au Kenya sans se ruiner: dans ces deux pays, la facture s’élève à 37.25 fr. selon notre scénario. C’est deux fois mieux que Swisscom et près de dix fois mieux que Sunrise, dont les clients paieront, dans le meilleur des cas, plus de 350 fr. pour leurs maigres communications, en raison du coût prohibitif du trafic de données.
La plupart du temps, activer ces options est donc intéressant.Mais prudence: une fois rentré au bercail, elles doivent être désactivées manuellement, faute de quoi elles se reconduisent de mois en mois. De plus, elles ne sont pas réellement valables 30 jours, mais durant un cycle de facturation. Autrement dit, si elles sont activées le 30 du mois, elles ne sont valables qu’un ou deux jours, mais payées intégralement! Et attention avec Salt: les cycles débutent le 10.
Comment payer moins?
Le meilleur moyen de limiter les coûts demeure, bien sûr, de ne pas emporter son téléphone portable en vacances. Pour ceux qui ne peuvent s’en passer, voici quatre conseils essentiels.
- Désactiver la messagerie vocale et les mises à jour automatiques.
- Utiliser autant que possible les réseaux wifi gratuits en profitant d’applications qui passent par internet, comme Skype pour les appels et Whatsapp pour les messages.
- Charger à l’avance sur le téléphone les cartes et les sites utiles.
- Acheter une carte SIM prépayée sur son lieu de vacances si c’est possible. Avec la carte blau.de (vendue en Allemagne, mais utilisable dans toute l’Europe), les communications vers le réseau fixe suisse ne coûtent que 10 ct./min. Aux USA, une carte Pay as you go de l’opérateur H20 Wireless permet d’appeler à la fois dans le pays et vers la Suisse pour 5 ct./min.
Vincent Cherpillod
* Sunrise: USA et Canada dès le 12 mai.
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En détail
Comment lire notre tableau
Dans la partie gauche, nous avons calculé le montant de la facture d’un utilisateur qui emporte son téléphone sur son lieu de vacances et l’utilise modérément. Il n’a pas d’abonnement incluant le roaming 1, passe et reçoit les communications suivantes.
- Un appel de dix minutes vers la Suisse.
- Un appel entrant de cinq minutes depuis la Suisse.
- Trois appels locaux, pour un total de dix minutes.
- 15 SMS.
- 20 Mo de données (e-mails, quelques pages internet et cartes).
Le montant total pour chaque opérateur a été calculé avec et sans l’activation des options de roaming qu’il est possible d’ajouter à son abonnement, contre supplément. Le même calcul a été fait pour les utilisateurs de cartes à prépaiement 2.
Dans la partie droite du tableau, nous avons relevé l’abonnement le moins cher de chaque opérateur qui inclut des prestations de roaming 3.