Il y a trois ans, Assura jetait un pavé dans la mare. Un courrier destiné à ses assurés proposait de se faire opérer des yeux à l’étranger via la société Novacorpus, à des prix bien plus bas qu’en Suisse. La chirurgie au laser dite «réfractive» n’étant pas remboursée par l’assurance de base, beaucoup ont franchi le pas. Mais, au-delà d’un simple intérêt financier, le tourisme médical pose d’autres questions.
De quoi parle-t-on?
Etant donné le niveau de l’offre de santé dans notre pays, deux raisons peuvent pousser des citoyens suisses à se rendre dans une autre contrée pour y subir une intervention: des prix plus attractifs ou une prestation qui n’est pas fournie chez nous. Selon une recherche publiée en juin 2011, par des étudiants de l’Université de Genève, les principales opérations concernées par le tourisme médical sont les chirurgies réfractive (yeux), dentaire et esthétique. Ce constat est toujours d’actualité.
Intéressant financièrement?
C’est le principal atout du tourisme médical: les prix pratiqués à l’étranger peuvent être bien plus bas, même si l’on prend en compte les frais de transport et de séjour. Novacorpus, le principal prestataire de ce genre de services en Suisse, propose par exemple de la chirurgie réfractive au laser à 999 fr. par œil en Turquie, examens et séjour en clinique privée inclus. Pour les clients d’Assura, le prix passera à 925 fr., soit 1850 fr. pour les deux yeux.
En comparaison, l’une des offres les moins chères en Suisse est celle que le Groupe Mutuel propose à ses assurés auprès de son partenaire lausannois MV Santé Vision pour 3600 fr. les deux yeux. Ainsi, et même si l’on ajoute le prix du transport en avion (compter environ 300 fr. aller-retour), l’offre turque peut faire baisser la facture de près de 1500 fr. (lire «Des prix qui en valent le coup d’œil»*, BàS 11/2010).
Et l’assurance?
Le tourisme médical a, et c’est logique, un intérêt pour les soins qui ne sont justement pas remboursés par l’assurance de base. Il se peut toutefois qu’ils rentrent dans le champ d’une complémentaire. Si vous vous rendez chez un dentiste en France pour la pose d’une couronne, par exemple, la couverture complémentaire pour soins dentaires prend parfois une partie des frais en charge. Mais les prestations varient bien sûr d’un assureur à l’autre. A la CSS, les conditions générales stipulent ainsi que les prestations à l’étranger ne sont prises en charge «que si le retour de l’assuré ne peut être exigé». Denta Plus, d’Assura, ne rembourse que si le dentiste est domicilié en Suisse ou dans une zone frontalière.
Pour sa part, l’offre Dental, de Sanitas, est valable si les traitements sont assurés «par des dentistes en Suisse ou à l’étranger». C’est le cas également d’Helsana, à condition que le praticien dispose d’une formation scientifique «équivalente à la formation suisse». Il convient donc de bien lire les conditions générales de son assurance complémentaire.
Y a-t-il des risques?
Lorsqu’on parle de tourisme médical, un point noir est souvent mentionné: le suivi des soins, qui ne pourrait être assuré par le même praticien, à moins de retourner à chaque fois sur les lieux. Ce qui peut être compliqué et onéreux. Il faut donc s’assurer qu’un médecin prendra le relais dès le retour.
De plus, si aucune assurance complémentaire prenant en charge les risques de complications post opératoires n’est proposée par le prestataire de tourisme médical, il convient de vérifier si l’on est couvert par un autre biais et, dans le cas contraire, trouver soi-même un service équivalent.
Enfin, la Fédération suisse des patients estime que le principal risque concerne les standards de qualité qui diffèrent, notamment au niveau de l’hygiène. Car s’ils sont connus pour être élevés en Suisse, difficile d’en être sûr dans un pays étranger, surtout s’il est lointain. Une visite préalable sur les lieux peut s’avérer utile, mais elle alourdit d’autant la note finale.
Loïc Delacour
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