Pour protéger les coteaux des aléas de la météo et des parasites, certains producteurs les traitent régulièrement avec des pesticides. Un terme qui regroupe aussi bien les herbicides que les insecticides, les fongicides et les traitements antiparasitaires.
Au fil du temps, les plantes développent toutefois des résistances, si bien que les producteurs conjuguent les produits pour augmenter leur efficacité. Cette stratégie permet aussi de respecter le seuil légal, dont les valeurs varient pour chaque élément, selon son degré de toxicité.
On ignore toutefois comment les différents résidus interagissent, et avec quelles conséquences pour la santé des consommateurs. Certains experts estiment que leur effet est alors démultiplié. Il n’y a toutefois pas de méthode reconnue pour évaluer le risque de l’«effet cocktail». Les normes légales ne tiennent donc compte ni du total des résidus ni du nombre de substances distinctes.
Combien de traitements subissent les vins que nous buvons au quotidien? Pour le savoir, nous avons confié à un laboratoire spécialisé dix-huit bouteilles de vin rouge à moins de 20 fr. parmi les plus vendues dans les grandes surfaces. Les experts y ont recherché plus de 400 pesticides différents. Si toutes respectent les normes légales, trois seulement ne recèlent aucune substance phytosanitaire ou insecticide (voir tableau).
Sept vins peu ou pas traités
Trois vins rouges sont exempts de résidus. En tête de classement, on trouve le Luzón Jumilla Organic Wine (Aldi), qui est aussi l’un des plus avantageux de la sélection. Le J.P. Chenet Cabernet-Syrah Vin de Pays d’Oc et le Naturaplan Bio Grande Réserve Château Pech-Latt Corbières AOC, disponibles tous les deux chez Coop, ne sont pas traités non plus.
Quatre crus jugés «bon» ne contiennent que des traces de pesticides. Qui peuvent aussi provenir de vignobles voisins (on parle alors de dérive), à moins que le vigneron ne stocke sa récolte dans des fûts ayant déjà servi.
«Effet cocktail» pénalisé
Sept autres bouteilles obtiennent la moyenne, six d’entre elles affichant des valeurs se situant entre 0,11 et 1 mg/kg. Le Salice Salentino Vecchia Torre se situe également dans cette catégorie, quand bien même sa teneur en pesticides est minime. Nous avons en effet déprécié les vins contenant quatre substances différentes et plus. C’est aussi le cas des trois crus notés «peu satisfaisant». Les experts ont enfin trouvé six pesticides différents totalisant 2,88 mg/kg dans le Merlot Ticino Selezione d’Ottobre (Manor et Coop) jugé «insatisfaisant».
Les producteurs ont fait valoir que leurs vins respectent les seuils légaux, et ne constituent donc pas de danger pour la santé des consommateurs. Manor souligne aussi que «les viticulteurs peuvent avoir recours aux produits phytosanitaires, comme c’est le cas dans l’agriculture en général».
Aldi justifie la multiplicité de substances utilisées dans le Syrah Valais en affirmant que ses cultures sont «écologiques, intégrées et durables». L’usage de plusieurs pesticides différents vise en effet à combattre les résistances développées par les plants.
Andreas Schildknecht / chr
Des cultures à l’assiette
Pesticides sous la loupe
L’utilisation de pesticides dans l’agriculture a augmenté exponentiellement depuis les années 1960. En 2011, plus de 2000 tonnes de substances phytosanitaires ont ainsi été vendues en Suisse. Pourquoi et avec quels effets sur l’organisme? Notre dossier «Poisons quotidiens» fait le point sur ces pratiques et donne des conseils utiles pour choisir et apprêter les produits issus de l’agriculture.