Un marché à respecter

Août: champignonneurs et amateurs de fruits des bois se régalent. Dans le respect des réglementations édictées par les cantons sur la cueillette. Du moins en principe.

Sommaire

Des règlements comme des champignonsLe Valais a rejeté l’idée d’un règlement en matière de champignons, Genève envisage d’en adopter un… Le foisonnement incohérent de réglementations cantonales pose problème et encourage le «tourisme mycologique» intercantonal. Les limitations dans le temps favorisent en outre certaines catégories de champignonneurs, et les restrictions de quantité encouragent les sorties les plus fréquentes. Que faire, sinon encourager un comportement responsable des amateurs, voire, comme le fait le Service vaudois de conservation de la nature, les inciter à consommer des champignons de culture?BE: Max. 2 kg par personne et par jour; interdiction totale du 1er au 7 de chaque mois.FR: Même régime; cueillette interdite de 20 h à 07 h, ainsi que dans les deux réserves mycologiques du canton (Montagny-les-Monts, Moosboden).GE: Aucune limitation.JU: Max. 2 kg/personne/jour. Cueillette interdite dans les réserves naturelles.NE: Aucune limitation, sauf dans les réserves naturelles (cueillette interdite).VD: Même régime.VS: Pas de réglementation cantonale, mais règlements communaux dans certaines régions où la cueillette est pratiquée (par exemple au Simplon).La forêt n’est pas de boisEn Suisse, les forêts ont toujours un propriétaire, à qui appartient donc également le bois que les forestiers y coupent. Mais une fois ceux-ci passés, subsistent parfois des restes, souvent mis à disposition du public moyennant accord du maître des lieux. Ramasser un peu de bois pour sa cheminée est donc possible… à condition de le demander – en général au garde-forestier responsable. Celui-ci fixe les conditions auxquelles le ramassage est possible: périmètre autorisé, dimension des branches, rarement perception d’un émolument ou dédommagement du propriétaire, etc. Dans tous les cas, il est indispensable de se renseigner, avant tout prélèvement, auprès de la commune ou du Service forestier cantonal. Ne serait-ce que pour obtenir l’autorisation de rouler en voiture sur un chemin forestier… généralement interdit à la circulation.Petites fleurs sous haute protection La cueillette des espèces protégées reste marginale – même si en Valais, le génépi est connu pour entrer dans la composition d’un apéritif. Le vrai problème, c’est l’information: les espèces protégées sont très nombreuses, et plusieurs semblent banales – comme le muguet (protégé à Berne et dans le Jura), le rhododendron (VD), toutes les gentianes (protégées dans toute la Suisse), etc. Les affiches de Pro Natura ont marqué des générations de promeneurs, mais leur efficacité est limitée. Le Jura, notamment, tente de résoudre la difficulté par la publication régulière de communiqués de presse.˛Régime fédéral (dans toute la Suisse): interdiction de cueillette des espèces figurant sur la liste de l’Annexe 2 de l’Ordonnance sur la protection de la nature (sauf autorisation).˛Régimes cantonaux: en plus des espèces protégées par la liste fédérale, des listes cantonales établissent souvent une catégorie intermédiaire (cueillette limitée à quelques exemplaires) et posant parfois une limite de quantité pour les plantes non protégées (quantité tenue dans une main).BE: Liste cantonale : deux catégories: plantes dont la cueillette est interdite, ou limitée à 10 exemplaires.FR: Idem; règle générale de la quantité tenue dans une main et commercialisation théoriquement interdite pour toutes les plantes.GE: Interdiction, sauf autorisation accordée pour motifs thérapeutiques ou gastronomiques; la liste cantonale reprend l’intégralité de la liste fédérale.JU: 3 catégories: interdiction totale, cueillette limitée à 5 exemplaires, cueillette modérée (quantité tenue dans une main). Une révision de l’ordonnance cantonale est prévue.NE: 2 catégories: interdiction totale et cueillette limitée à 10 exemplaires.VD: Même régime + quantité maximale tenue dans une main pour les fleurs non protégées (ordonnance en cours de révision pour l’an prochain).VS: Régime d’interdiction totale ou d’autorisation; en vigueur depuis octobre 2000.Pique-meurons et peigne à myrtillesLes baies comestibles ne figurent pas sur les listes protégées: aucune restriction à la cueillette – même si Vaud envisage de le faire. Les cantons régissent parfois le mode de récolte (à la main ou mécanique) et en interdisent la commercialisation. Un cas pratique en Valais: une entreprise avait demandé il y a quelques années l’autorisation de cueillir les baies d’argousier pour en faire de la confiture.BE: Pas de restriction; autorisation nécessaire pour la commercialisation.FR: Pas de restriction; commercialisation autorisée par la loi.GE: Pas de restriction (les Genevois sont d’ailleurs appelés parfois les «pique-meurons»).JU: Pas de restriction; l’arrachage de buissons est interdit par le biais des dispositions interdisant le dénichage des oiseaux.NE: Pas de restriction, sauf dans les réserves naturelles. Commercialisation autorisée.VD: Récolte autorisée, mais moyens mécaniques interdits, sauf le peigne à myrtilles. Quantité limitée… appréciée au cas par cas.VS: Pas de restriction.Le «petit gris», seigneur des anneauxL’escargot de Bourgogne n’est guère menacé aujourd’hui. Il n’en a pas toujours été ainsi: le ramassage assidu de naguère a conduit à des abus et a entraîné dans certains cantons une interdiction totale de ramassage qui subsiste parfois encore. Mais la chasse au «petit gris», autrefois pratiquée par des classes entières, est quelque peu passée de mode.BE: Interdiction totale.FR: Idem.GE: Interdiction du 15 mars au 15 juillet. Limitation du ramassage aux escargots de vigne dont la coquille dépasse 35 mm de diamètre et aux «petits gris» dont la coquille forme un renflement. Quantité limitée à 6 douzaines par personne, ou 12 douzaines par véhicule.JU: Interdiction totale.NE: Ramassage soumis à l’octroi d’un permis (60 fr. pour les habitants du canton, 120 fr. pour les autres); ramassage limité aux individus de + de 35 mm de diamètre (anneau-gabarit vendu 2 fr.).VD: Même régime. Permis = 40 fr. pour les Vaudois, 80 fr. pour les autres; anneau: 3 fr.VS: Ramassage autorisé jusqu’à 10 kg par personne et par jour. Commerce interdit.Pommes de discorde…Les fruits de verger ne sont pas à proprement parler des bienfaits naturels, étant le résultat d’une culture pratiquée sur un bien-fonds. Leur accès n’est jamais libre, mais réglé par les dispositions du droit de voisinage, les mêmes dans toute la Suisse: interdiction de les cueillir ou de les ramasser sur une propriété privée! En revanche, il est loisible au promeneur de prélever les fruits d’une branche dépassant visiblement sur un chemin public (mais l’usage d’une échelle est exclu!).…et raisins de la colèreLa vigne connaît en général un régime particulier, celui de la mise à ban: une interdiction totale d’accès, limitée à une période définie avant et pendant les vendanges. Après la récolte, le raisin qui reste n’est pas en libre-service pour autant: il s’agit peut-être de grappes laissées à flétrir pour une vendange tardive, ou parce que le vigneron a déjà cueilli la quantité conforme au quota fixé par les règles de l’Appellation d’origine contrôlée. Dans tous les cas, c’est au propriétaire seul d’en disposer.pour en savoir plus• Trouver sur le Web les dispositions fédérales sur les espèces protégées (Loi et Ordonnance sur la protection de la nature, et liste énumérée par l’annexe n° 2: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c451.html.• Connaître le nom, l’aspect, l’habitat et tout ce qu’il faut savoir sur les plantes protégées de Suisse: Les plantes protégées de Suisse, Mathias Vust et Pierre Galland, Delachaux et Niestlé, Lausanne, 2001.• Apprendre comment champignonner sans piller: Respecter les champignons, brochure réalisée par l’Union vaudoise des sociétés mycologiques et le Service cantonal de la conservation de la nature (021/694 82 00), 1997.

Bon à Savoir 08-2001

15.08.2001

Blaise Guignard

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On n’hérite pas la terre de ses parents, on l’emprunte à ses enfants», a dit un jour Saint-Exupéry. Evidemment, certains emprunteurs ont la main lourde lorsqu’il s’agit de se servir des bienfaits naturels – champignons, baies, fleurs, etc.
La Loi et l’Ordonnance sur la protection de la nature définissent donc des listes d’espèces protégées dont la cueillette est interdite, ou restreinte. Les cantons, eux aussi, ont élaboré leurs propres inventaires, reprenant souvent tout ou partie des listes fédérales et ajoutant d’autres espèces. Pas par fédéralisme, mais en fonction de la distribution des espèces et des traditions de cueillette locales.
Conséquence: une floraison anarchique de lois, arrêtés et règlements. Un manque de cohérence sans grand impact sur la flore protégée, dont la cueillette reste marginale. Il en va autrement
en matière de champignons: certains amateurs contournent les restrictions posées
à leur passion en se ren-
dant dans un canton voisin, occasionnant de véritables razzias.

Admirer... sur place!
Pour limiter les effets de ce tourisme mycologique, certains offices de protection de la nature suggèrent une meilleure cohérence en matière de lois cantonales. D’autres estiment qu’il faut avant tout miser sur la prévention. Tous sont unanimes sur un point: dans la mesure du possible, la nature doit s’apprécier in situ et non se consommer sur assiette…
Sans rejeter cette invitation à l’ascèse, nous vous proposons tout de même un tour d’horizon des réglementations en matière de bienfaits naturels. Champignons, fleurs et fruits en tête, mais aussi, pourquoi pas… bois de coupe et escargots.
Blaise Guignard

Des règlements comme des champignons
Le Valais a rejeté l’idée d’un règlement en matière de champignons, Genève envisage d’en adopter un… Le foisonnement incohérent de réglementations cantonales pose problème et encourage le «tourisme mycologique» intercantonal. Les limitations dans le temps favorisent en outre certaines catégories de champignonneurs, et les restrictions de quantité encouragent les sorties les plus fréquentes. Que faire, sinon encourager un comportement responsable des amateurs, voire, comme le fait le Service vaudois de conservation de la nature, les inciter à consommer des champignons de culture?
BE: Max. 2 kg par personne et par jour; interdiction totale du 1er au 7 de chaque mois.
FR: Même régime; cueillette interdite de 20 h à 07 h, ainsi que dans les deux réserves mycologiques du canton (Montagny-les-Monts, Moosboden).
GE: Aucune limitation.
JU: Max. 2 kg/personne/jour. Cueillette interdite dans les réserves naturelles.
NE: Aucune limitation, sauf dans les réserves naturelles (cueillette interdite).
VD: Même régime.
VS: Pas de réglementation cantonale, mais règlements communaux dans certaines régions où la cueillette est pratiquée (par exemple au Simplon).

La forêt n’est pas de bois
En Suisse, les forêts ont toujours un propriétaire, à qui appartient donc également le bois que les forestiers y coupent. Mais une fois ceux-ci passés, subsistent parfois des restes, souvent mis à disposition du public moyennant accord du maître des lieux.
Ramasser un peu de bois pour sa cheminée est donc possible… à condition de le demander – en général au garde-forestier responsable. Celui-ci fixe les conditions auxquelles le ramassage est possible: périmètre autorisé, dimension des branches, rarement perception d’un émolument ou dédommagement du propriétaire, etc.
Dans tous les cas, il est indispensable de se renseigner, avant tout prélèvement, auprès de la commune ou du Service forestier cantonal. Ne serait-ce que pour obtenir l’autorisation de rouler en voiture sur un chemin forestier… généralement interdit à la circulation.

Petites fleurs sous haute protection
La cueillette des espèces protégées reste marginale – même si en Valais, le génépi est connu pour entrer dans la composition d’un apéritif. Le vrai problème, c’est l’information: les espèces protégées sont très nombreuses, et plusieurs semblent banales – comme le muguet (protégé à Berne et dans le Jura), le rhododendron (VD), toutes les gentianes (protégées dans toute la Suisse), etc. Les affiches de Pro Natura ont marqué des générations de promeneurs, mais leur efficacité est limitée. Le Jura, notamment, tente de résoudre la difficulté par la publication régulière de communiqués de presse.
˛Régime fédéral (dans toute la Suisse): interdiction de cueillette des espèces figurant sur la liste de l’Annexe 2 de l’Ordonnance sur la protection de la nature (sauf autorisation).
˛Régimes cantonaux: en plus des espèces protégées par la liste fédérale, des listes cantonales établissent souvent une catégorie intermédiaire (cueillette limitée à quelques exemplaires) et posant parfois une limite de quantité pour les plantes non protégées (quantité tenue dans une main).
BE: Liste cantonale : deux catégories: plantes dont la cueillette est interdite, ou limitée à 10 exemplaires.
FR: Idem; règle générale de la quantité tenue dans une main et commercialisation théoriquement interdite pour toutes les plantes.
GE: Interdiction, sauf autorisation accordée pour motifs thérapeutiques ou gastronomiques; la liste cantonale reprend l’intégralité de la liste fédérale.
JU: 3 catégories: interdiction totale, cueillette limitée à 5 exemplaires, cueillette modérée (quantité tenue dans une main). Une révision de l’ordonnance cantonale est prévue.
NE: 2 catégories: interdiction totale et cueillette limitée à 10 exemplaires.
VD: Même régime + quantité maximale tenue dans une main pour les fleurs non protégées (ordonnance en cours de révision pour l’an prochain).
VS: Régime d’interdiction totale ou d’autorisation; en vigueur depuis octobre 2000.

Pique-meurons et peigne à myrtilles
Les baies comestibles ne figurent pas sur les listes protégées: aucune restriction à la cueillette – même si Vaud envisage de le faire. Les cantons régissent parfois le mode de récolte (à la main ou mécanique) et en interdisent la commercialisation. Un cas pratique en Valais: une entreprise avait demandé il y a quelques années l’autorisation de cueillir les baies d’argousier pour en faire de la confiture.
BE: Pas de restriction; autorisation nécessaire pour la commercialisation.
FR: Pas de restriction; commercialisation autorisée par la loi.
GE: Pas de restriction (les Genevois sont d’ailleurs appelés parfois les «pique-meurons»).
JU: Pas de restriction; l’arrachage de buissons est interdit par le biais des dispositions interdisant le dénichage des oiseaux.
NE: Pas de restriction, sauf dans les réserves naturelles. Commercialisation autorisée.
VD: Récolte autorisée, mais moyens mécaniques interdits, sauf le peigne à myrtilles. Quantité limitée… appréciée au cas par cas.
VS: Pas de restriction.

Le «petit gris», seigneur des anneaux
L’escargot de Bourgogne n’est guère menacé aujourd’hui. Il n’en a pas toujours été ainsi: le ramassage assidu de naguère a conduit à des abus et a entraîné dans certains cantons une interdiction totale de ramassage qui subsiste parfois encore. Mais la chasse au «petit gris», autrefois pratiquée par des classes entières, est quelque peu passée de mode.
BE: Interdiction totale.
FR: Idem.
GE: Interdiction du 15 mars au 15 juillet. Limitation du ramassage aux escargots de vigne dont la coquille dépasse 35 mm de diamètre et aux «petits gris» dont la coquille forme un renflement. Quantité limitée à 6 douzaines par personne, ou 12 douzaines par véhicule.
JU: Interdiction totale.
NE: Ramassage soumis à l’octroi d’un permis (60 fr. pour les habitants du canton, 120 fr. pour les autres); ramassage limité aux individus de + de 35 mm de diamètre (anneau-gabarit vendu 2 fr.).
VD: Même régime. Permis = 40 fr. pour les Vaudois, 80 fr. pour les autres; anneau: 3 fr.
VS: Ramassage autorisé jusqu’à 10 kg par personne et par jour. Commerce interdit.

Pommes de discorde…
Les fruits de verger ne sont pas à proprement parler des bienfaits naturels, étant le résultat d’une culture pratiquée sur un bien-fonds. Leur accès n’est jamais libre, mais réglé par les dispositions du droit de voisinage, les mêmes dans toute la Suisse: interdiction de les cueillir ou de les ramasser sur une propriété privée! En revanche, il est loisible au promeneur de prélever les fruits d’une branche dépassant visiblement sur un chemin public (mais l’usage d’une échelle est exclu!).

…et raisins de la colère
La vigne connaît en général un régime particulier, celui de la mise à ban: une interdiction totale d’accès, limitée à une période définie avant et pendant les vendanges. Après la récolte, le raisin qui reste n’est pas en libre-service pour autant: il s’agit peut-être de grappes laissées à flétrir pour une vendange tardive, ou parce que le vigneron a déjà cueilli la quantité conforme au quota fixé par les règles de l’Appellation d’origine contrôlée. Dans tous les cas, c’est au propriétaire seul d’en disposer.

pour en savoir plus
• Trouver sur le Web les dispositions fédérales sur les espèces protégées (Loi et Ordonnance sur la protection de la nature, et liste énumérée par l’annexe n° 2: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c451.html.
• Connaître le nom, l’aspect, l’habitat et tout ce qu’il faut savoir sur les plantes protégées de Suisse: Les plantes protégées de Suisse, Mathias Vust et Pierre Galland, Delachaux et Niestlé, Lausanne, 2001.
• Apprendre comment champignonner sans piller: Respecter les champignons, brochure réalisée par l’Union vaudoise des sociétés mycologiques et le Service cantonal de la conservation de la nature (021/694 82 00), 1997.