C’est la tuile. On pensait que la panne serait facilement résolue pour un prix abordable. Sauf que le fabricant a décidé de ne pas livrer le composant défectueux séparément: il le propose uniquement avec d’autres pièces dont on n’a pas besoin. Du coup, le coût de la réparation s’envole. A tel point que le client préfère jeter son appareil pour en acheter un autre.
Ce cas de figure se présente plus souvent qu’on le croit, même s’il reste encore minoritaire. Toujours est-il que le raisonnement et les motivations des fabricants sont difficiles à comprendre lorsque de telles inepties n’ont aucune justification technique. Voici trois exemples très parlants qui ont marqué notre atelier de réparations au cours des derniers mois.
⇨ La bague jamais seule: plusieurs marques équipent leurs machines à café de type Nespresso du même élément qui accueille la capsule et fait circuler l’eau dans celle-ci. Il est composé d’une bague en plastique qui positionne la capsule et participe à l’étanchéité du circuit d’eau. A l’usage, cette bague peut s’user jusqu’à provoquer un dysfonctionnement du système.
Pour y remédier, il suffit théoriquement de démonter cette bague – qui est simplement clipsée – et de la remplacer. Malheureusement, il est impossible de l’obtenir séparément! Par conséquent, la réparation qui aurait pu coûter quelques francs seulement exige le remplacement de toute l’unité facturée une soixantaine de francs. De quoi inciter certains clients à changer de machine, sachant que les modèles bon marché se négocient à moins de 100 fr.
⇨ La turbine et l’accu: plusieurs modèles d’aspirateurs à main fonctionnent sur accumulateurs dont l’usure représente une bonne part des réparations. Mais, parfois aussi, c’est la turbine (moteur) qui rend l’âme. Son remplacement n’est certes pas bon marché. Mais il est surtout plombé par la politique de la marque qui a décidé de ne pas fournir une turbine seule: une batterie neuve fait également partie du lot! Une fois encore, c’est une manière de rendre la réparation plus coûteuse qu’elle ne devrait l’être.
⇨ Pas de clip sans module: quelle ne fut pas la surprise d’un client qui comptait régler un problème mineur sur son lave-vaisselle. Sur cet appareil, la tranche de la porte est ornée d’un bandeau en acier inoxydable. Cette pièce est fixée par de petits clips en plastique qui font partie intégrante du châssis du tableau de commande. Pour une raison indéterminée, les clips se sont cassés, provoquant l’instabilité du bandeau en question.
Pour corriger ce problème plus esthétique que technique, on pourrait penser qu’il suffit de remplacer le châssis du tableau de commande. En vérité, le châssis sert également de support au module électronique. Et le fabricant n’a rien trouvé de mieux que de vendre ces deux pièces ensemble pour un montant qui avoisine 800 fr. A ce tarif-là, on finit pas trouver une autre solution…
⇨ Des prix tordus: dans le même ordre d’idée, on constate parfois que le prix des pièces de rechange ne répond à aucune logique. C’est le cas d’un tuyau d’aspirateur que nous avons récemment changé. L’élément complet, qui comprend le tuyau et la poignée – est facturé 57 fr. Séparément, le tuyau est pourtant vendu 48 fr. et la poignée 47 fr. De toute évidence, le fabricant fait tout pour forcer le remplacement du tuyau complet.
Christophe Inaebnit, de l'atelier de réparation «La Bonne Combine»
Eclairage
Des aberrations à dénoncer!
Cette forme d’obsolescence programmée concerne de nombreux produits. Mais il n’existe hélas pas de recette pour identifier l’existence de tels pièges lors de l’achat d’un appareil. Bien souvent, c’est lorsque la panne survient que la politique aberrante d’une marque apparaît au grand jour, à condition que le réparateur l’explique au client. Quoi qu’il en soit, le consommateur est, une fois encore, le grand perdant de ces stratégies peu reluisantes. Tout comme l’environnement, d’ailleurs, qui pâtit du gaspillage que cela induit.
On ne peut qu’encourager celles et ceux qui font de mauvaises expériences de manifester leur mécontentement auprès du fabricant. Et de partager leurs remarques et leur agacement avec d’autres par le biais du bouche à oreille, des forums sur internet et en écrivant à [email protected]. Fondamentalement, un client insatisfait ne va pas inciter une marque à revoir sa politique commerciale. Mais, en affichant leur volonté commune d’acheter des appareils réparables, les consommateurs peuvent faire avancer les choses dans le bon sens.