Tout augmente – surtout les loyers – alors que la pénurie de logements sévit dans les agglomérations. Partager un appartement peut sembler une solution attractive, mais elle n’est pas sans risques. Voici cinq questions auxquelles tout colocataire ferait mieux de connaître les réponses.
Nous avons pris un appartement à quatre. L’un des colocataires nous mène la vie dure. Nous souhaitons qu’il parte. Peut-on le mettre dehors si nous sommes une majorité à vouloir son départ?
Non. Si le bail a été signé en commun, les cosignataires forment ensemble une communauté indivisible. Pour exercer leurs droits de locataires, ils doivent prendre les décisions à l’unanimité, notamment pour résilier, sous-louer ou demander une baisse de loyer. Changer de preneur(s) de bail demande en outre l’aval de tous ceux qui l’ont conclu, y compris celui du bailleur.
Cette situation peut parfois devenir problématique, car même lorsqu’un membre souhaite s’en aller avec la bénédiction de ses colocs, il peut vite se retrouver enchaîné. Car tant qu’il n’est pas officiellement biffé du bail, il y reste lié, même s’il n’habite plus les lieux. La seule solution est alors de saisir le juge pour demander la liquidation judiciaire de la communauté et des engagements contractuels passés par elle.
Mon colocataire s’est évanoui dans la nature sans payer sa part de loyer. La gérance peut-elle me réclamer la totalité des montants impayés ou seulement le 50%?
La totalité. La communauté que vous formiez avec votre ancien colocataire était assimilable, pour le bailleur, à une seule entité. A l’intérieur de celle-ci, les deux locataires sont codébiteurs solidaires: la gérance peut se retourner au choix contre l’un ou l’autre pour l’entier des montants en souffrance. C’est à la charge de celui qui a versé plus que sa part de se débrouiller pour récupérer son dû auprès du mauvais payeur.
Je partage un appartement avec deux copains. Je paie une partie du loyer, mais je ne suis pas sur le bail. Ils m’ont annoncé oralement que je devais partir à la fin du mois. Ont-ils le droit de me mettre dehors ainsi?
Non. Au niveau juridique, vous n’êtes pas en colocation, puisque vous ne figurez pas sur le bail principal. Cela ne signifie pas pour autant qu’il n’y a pas de contrat valable entre vos amis et vous. En réalité, vous êtes sous-locataire, et avez, envers vos camarades, les mêmes droits qu’un locataire vis-à-vis de son bailleur. Pour résilier une chambre meublée, un préavis d’au moins quinze jours pour la fin d’un mois est obligatoire ainsi qu’une formule officielle de résiliation. Vous pouvez contester ce congé dans les 30 jours auprès de la Commission de conciliation s’il est abusif ou demander une prolongation.
Je me suis séparée de mon mari. Comme il garde l’appartement, je ne veux plus être sur le bail. La gérance doit-elle accepter de biffer mon nom si j’ai quitté les lieux?
Tant que vous n’êtes que séparés, elle n’y est pas tenue. Pour modifier un contrat tel qu’il a été conclu au départ, il faut l’accord de tout le monde, y compris celui de votre mari. En revanche, au moment de votre divorce, et si le juge attribue l’ancien logement de famille à votre ex, votre bailleur ne pourra pas s’opposer à votre congé et devra simplement prendre acte du fait que vous n’êtes plus locataire. Vous resterez néanmoins codébitrice des loyers jusqu’au prochain terme contractuel, mais au plus pour deux ans.
Est-ce vraiment utile de rédiger un contrat écrit entre colocataires si tout le monde est déjà inscrit sur le bail?
Oui. Les décisions prises à l’intérieur de la communauté ne lient pas le bailleur, mais elles ont l’énorme avantage de clarifier la situation entre ses membres: qui paie quoi (loyer, garantie, charges), quels sont les règles de vie, les pièces communes, les parties exclusives, etc. En outre, si un des colocataires se retrouve contraint de payer plus que sa part, il pourra plus facilement intenter des poursuites contre le fautif s’il dispose d’un document écrit et signé de sa plume.
Silvia Diaz