La forteresse Poste est attaquée de toutes parts. D’un côté, l’initiative syndicale, intitulée «Pour une poste forte». Débattue ce matin, le Conseil National l’a rejetée sans surprise sur un score de 123 non et 56 oui. De l’autre, l’initiative «En faveur du service public», lancée le 6 mars dernier par les magazines de consommateurs des trois régions linguistiques, Bon à Savoir, K-Tipp, Saldo et Spendere Meglio.
Les deux initiatives n’ont pas la même origine ni les mêmes objectifs, mais elles se rejoignent sur la volonté de préserver la qualité du service postal, soumis à une pression grandissante, sous prétexte de rentabilité accrue et de gestion calquée sur le modèle privé.
Les syndicats tirent les premiers
Les syndicats et le Parti socialiste, emmenés par Syndicom, ont été les premiers à tirer la sonnette d’alarme. Leur initiative, déposée le 2 septembre 2010, a fait le plein de signatures en l’espace de cinq mois. Son objectif est double. D’une part, elle veut garantir pour tous les habitants un accès rapide et aisé à toutes les prestations du service universel. D’autre part, elle exige de La Poste qu’elle exploite son réseau avec son propre personnel, garantissant à celui-ci des bonnes conditions de travail, contrairement à celles qui ont souvent lieu au sein des entreprises sous-traitantes. Enfin, l’initiative prévoit de financer sa «poste forte» par le maintien du monopole sur les lettres ainsi que les bénéfices d’une future banque postale.
Alain Carrupt, co-président de Syndicom, avait lui-même prédit que leur initiative soit balayée aujourd’hui par la majorité de droite du Parlement. Elle devrait connaître le même sort au Conseil des Etats où elle sera traitée cet automne. La majorité parlementaire et le Conseil Fédéral font valoir que la plupart des exigences de l’initiative ont été reprises dans la nouvelle loi ainsi que dans son ordonnance.
Certes, cette dernière offre quelques garanties en matière de desserte (pour 90% de sa clientèle) et propose d’étendre l’activité bancaire de PostFinance. Mais Syndicom ne se satisfait pas de ces progrès qu’il salue comme une réponse à la pression mise par leur initiative. Par ailleurs, les évolutions annoncées restent hypothétiques tant que l’ordonnance n’est pas promulguée. Pas question, donc de retirer leur initiative qui reste, insiste Alain Carrupt, parfaitement d’actualité.
Initiative de consommateurs
Pour sa part, notre initiative «En faveur du service public vise à préserver les intérêts des consommateurs, aujourd’hui et demain, contre la tendance entreprises de services publics (Poste, CFF, Swisscom, etc.) à réduire les prestations, tout en augmentant les tarifs. De notre point de vue, les entreprises aux mains de la collectivité doivent servir les intérêts de la population et n’ont pas vocation à faire des bénéfices – payés par les usagers– pour soulager les finances de la Confédération. Par ailleurs, mais les choses sont liées, notre initiative demande de mettre un frein aux rémunérations exorbitantes de certains dirigeants dont certains, tel le patron de Swisscom, reçoivent jusqu’à trois fois le salaire d’un Conseiller fédéra!
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Philippe Chevalier