On ne plaisante pas avec les rayons ultraviolets. Pour prévenir les risques de brûlure et, à long terme, de cancer de la peau, il faut protéger son épiderme lors de toute exposition prolongée au soleil. Les crèmes solaires proposées sur le marché sont-elles aussi efficaces que le laissent croire les emballages? Pour le savoir, nous avons fait tester en laboratoire huit laits des marques les plus vendues affichant des indices de protection entre 25 et 30 (lire encadré).
Le résultat est réjouissant: non seulement tous les produits filtrent les rayons UVB avec l’efficacité promise, mais ils dépassent même les valeurs indiquées (voir tableau). Pourquoi tant de zèle de la part des fabricants? Les composants, expliquent ces derniers, sont dosés de façon à tenir les promesses de l’emballage. Et cela malgré d’inévitables variations lors du processus de fabrication. Denner ajoute que «l’efficacité du produit doit être garantie pendant toute la durée de sa conservation».
Filtrer les UVA
La protection contre les rayons UVA est, quant à elle, garantie par sept des huit produits de notre sélection. Seule la crème solaire d’Eco Cosmetics, pourtant très bien notée pour les UVB, ne remplit pas ce critère. Elle n’atteint que l’indice 5, largement insuffisant pour prévenir les effets néfastes du rayonnement.
Cet écart défavorable trouve son origine dans les filtres minéraux exclusivement naturels qui entrent dans la composition de la crème solaire d’Eco Cosmetics. Ces écrans sont constitués de poudres microscopiques opaques (dioxyde de titane, talc, mica, oxyde de zinc, oxyde de fer ou kaolin) qui réfléchissent la lumière comme autant de miroirs. Excellents contre les rayons UVB, ils le sont en revanche nettement moins contre les UVA.
Dieter Sorge, directeur d’Eco Cosmetics, juge cette protection suffisante. Il conteste nos résultats et met en cause les conditions de réalisation du test. Un argument balayé par Mathias Rohr, directeur du laboratoire mandaté: «La différence par rapport au minimum exigible dépasse de loin la marge explicable par des imprécisions de mesure.»
Le glas des produits naturels
Depuis le début de 2009 une nouvelle directive de Bruxelles exige en effet que le filtre UVA atteigne le tiers de l’indice de protection affiché sur l’emballage. Soit entre 8 et 10 pour notre sélection. En Suisse, ce n’est pour l’heure qu’une simple recommandation.
Les crèmes à filtre minéral ont ainsi quasiment disparu des commerces. Même la ligne de produits cosmétiques Weleda, dont la gamme de crèmes solaires à base d’écrans naturels rencontrait un franc succès, a stoppé la production. «Il est impossible de remplir les exigences européennes avec des composants naturels», précise la société. Idem pour les produits Dr.Hauschka.
Les fabricants de crèmes naturelles déplorent cette évolution, qu’ils attribuent à un lobbying intensif de l’industrie chimique. «Ces laits solaires suffisent largement si on s’expose raisonnablement», renchérit Reinhard Dummer, dermatologue et professeur à l’Université de Zurich. Lors d’une longue randonnée en montagne, en revanche, on veillera à se protéger suffisamment des UVA, en optant par exemple pour une crème à écran chimique.
Substances allergènes
En absorbant de manière sélective l’énergie des rayons UVB et UVA, ces substances assurent une bonne protection photochimique. Mais elles soulèvent un autre problème: celui de la tolérance aux substances utilisées, à l’origine de certaines allergies.
C’est pourquoi, nous avons demandé au laboratoire de déceler l’éventuelle présence de composants allergènes. A l’exception de la crème Eco Cosmetics, tous les produits de notre sélection en contiennent, dans des valeurs plus ou moins importantes. Les experts ont ainsi relevé la présence d’éthylhexyl méthoxycinnamate dans le flacon de Nivea et de benzophénon e-3 (oxybenzone) dans celui de Piz Buin. De même que de l’octocrylène, présent dans tous les flacons. Son action est similaire à celle des hormones, mais ses effets demeurent pour l’heure inconnus.
Les personnes à la peau sensible useront donc de ces crèmes avec modération et veilleront à s’exposer aux rayons de l’astre solaire en observant les règles de prudence*.
Précision utile: rien ne distingue les crèmes pour adultes de celles pour enfants, si ce n’est l’emballage et, parfois, leur coloration. Pour ces derniers, il convient néanmoins de privilégier des indices de protection élevés. La meilleure protection pour un tout-petit étant toutefois de… rester à l’ombre.
Rolf Muntwyler / chr
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En détail
Les critères du test
Le laboratoire de l’Institut Schrader, à Holzminden en Allemagne, spécialisé dans les examens de la peau, a testé l’efficacité de huit protections solaires, selon les critères suivants.
- Rayonnement UVB: l’indice de protection solaire affiché se réfère au filtrage des rayons UVB. Ce sont eux qui sont responsables des coups de soleil et peuvent, à la longue, déclencher un cancer de la peau. Le laboratoire a enduit les crèmes à tester sur le dos de douze testeurs d’âge, de sexe et de type de peau différents. Après un quart d’heure, ils sont été soumis à des rayons UVB. Vingt-quatre heures plus tard, le laboratoire a analysé les effets de ce rayonnement sur la peau.
- Rayonnement UVA: les UVA pénètrent dans la peau plus profondément que les UVB. Ils accélèrent son vieillissement et peuvent aussi être à l’origine d’un cancer. Afin d’évaluer la capacité des produits à filtrer ces rayons, les experts ont appliqué les crèmes sur une plaque de plexiglas transparente et mesuré la part non retenue.