Le café a des effets bénéfiques sur la santé. Mais il enferme aussi des composants nocifs dont on se passerait volontiers. C’est ce qu’a confirmé un laboratoire spécialisé qui a analysé des cafés en grains ou moulus ainsi que des capsules et un café instantané. Du furane au mépiquat, en passant par l’acrylamide, les substances problématiques ne manquent pas (lire encadré).
Le furane emprisonné
Le constat est clair: le café en grains obtient les meilleurs résultats (voir tableau). Les neuf paquets examinés – dont deux de culture biologique – décrochent la mention «bon» ou «très bon». A l’inverse, seulement deux des dix capsules analysées sont jugées «bon». Il s’agit des Tassimo Jacobs Médaille d’Or et Mövenpick Der Himmlische Lungo. Le point commun de toutes les dosettes? Elles renferment du furane, une molécule critique produite durant la torréfaction.
Le furane est classé potentiellement cancérigène par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). L’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) se montre également préoccupée, principalement pour les grands consommateurs d’aliments contenant du furane. Comme il n’existe actuellement pas de valeur limite à ne pas dépasser, mieux vaut l’éviter par principe de précaution.
La concentration de furane des capsules variait entre 110 et 490 microgrammes par litre (μg/l). C’est dans les dosettes Mövenpick Der Himmlische Lungo que le taux était le plus faible. A l’inverse, les Nespresso Arpeggio et les Bellarom Espresso Intenso de Lidl affichaient les teneurs les plus marquées. Les experts attribuent le taux élevé de furane dans les capsules à leur fermeture hermétique, empêchant ce composé très volatil, de s’évaporer au contact avec l’eau chaude à haute pression. Or, plus le temps d’exposition du café à l’air est long, plus cette substance a le temps de s’évaporer.
Plus d’acrylamide dans l’instantané
Les cafés en grains sont nettement moins problématiques sur ce point. A l’exception du Caffè Crema de Denner et du Sumatra Dark Roast de Starbucks, aucune trace de furane n’a été décelée dans les neuf paquets analysés. Seul produit instantané à avoir été examiné, le Nescafé Gold De Luxe est également irréprochable à cet égard. En revanche, c’est l’article le plus chargé en acrylamide, une molécule potentiellement cancérigène. Il a néanmoins obtenu une note «satisfaisant» sur ce critère, sachant qu’il demande moins de café pour se préparer un petit noir qu’un système espresso, à filtre ou à capsule.
Autre substance traquée par les experts, le mépiquat a été décelé dans tous les produits. Formé à partir de composés naturels durant la torréfaction, il est également utilisé par les producteurs comme pesticide pour accroître les récoltes. Sa teneur dans les grains non torréfiés ne devrait pas dépasser 0,1 milligramme par kilo (mg/kg). Or, dix-sept des vingt échantillons présentaient des valeurs plus élevées. Le record est détenu par le Sumatra Dark Roast de Starbucks qui culminait à 1,2 mg/kg. Mais, comme la quantité de mépiquat est fortement diluée dans une tasse fraîchement préparée, aucun produit n’a écopé d’une note «insuffisant» sur ce critère.
Métaux lourds partout
Le laboratoire a également trouvé des traces de métaux lourds (plomb, aluminium, etc.) dans tous les échantillons. La bonne nouvelle, c’est que la concentration respectait les limites légales. Les capsules Prix Garantie Lungo de Coop ont néanmoins été pénalisées d’un demi-point en raison d’un taux d’aluminium (30 mg/kg) nettement supérieur aux autres. Idem pour les capsules Espresso Tipo Napoli de Caffè Ferrari qui renfermaient 24 fois plus de plomb que la concurrence.
Enfin, les experts ont porté leur attention sur la présence d’ochratoxine A. Le développement de cette mycotoxine est notamment provoqué par un mauvais stockage. Si, près de la moitié des échantillons en contenait, les limites légales n’ont jamais été dépassées. Le Bonga Red Mountain a néanmoins été pénalisé d’un demi-point en raison d’une quantité bien supérieure aux autres.
Contactés, la plupart des détaillants et des fabricants affirment que les valeurs mesurées de leurs produits sont conformes aux exigences légales. Nespresso note que le furane se forme dans de nombreux aliments lorsqu’ils sont chauffés. Migros relève qu’elle a «étudié et optimisé» le processus de formation du furane. Original Food, fabricant de l’expresso Bonga Red Mountain, souligne que le furane s’évapore rapidement dans la tasse.
De son côté, Nestlé déclare qu’elle s’efforce de réduire la quantité d’acrylamide contenue dans le café. Aldi et Lidl affirment, pour leur part, que le mépiquat n’est pas utilisé comme pesticide. Selon Aldi, le mépiquat qui se forme pendant la torréfaction serait «inoffensif».
Le café protège le foie
Malgré les résidus trouvés, le café est bon pour la santé. Il contient de nombreux polyphénols, qui réduisent le risque de maladies cardiovasculaires et de diabète. Ces molécules protègent également les cellules et le foie des dommages causés par l’alcool. Cependant, leur effet n’est visible qu’à partir du moment où l’on boit régulièrement entre trois et cinq tasses par jour.
On sait aussi que le café rend plus performant en l’espace de quelques minutes. «Comme la caféine se dissout facilement dans l’eau, peu importe que l’on boive un expresso ou un café long», ajoute Chahan Yeretzian, du Centre de compétences sur le café de la Haute Ecole zurichoise des sciences appliquées (ZHAW) à Wädenswil. Cependant, à fortes doses, il rend nerveux et peut provoquer des palpitations cardiaques. Raison pour laquelle les experts recommandent de ne pas en boire plus de quatre tasses par jour.
Sabine Rindlisbacher / ab
Les critères du test
Un laboratoire spécialisé a analysé les 20 cafés en se focalisant sur les substances suivantes.
1. Furane
Cette molécule se forme lors de la cuisson d’aliments, tels que le café ou les céréales. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) classe le furane comme une substance susceptible de provoquer le cancer et de nuire au patrimoine génétique. Pour l’heure, aucune limite légale n’a été fixée. Une note «insuffisant» a été attribuée aux échantillons qui en contenaient plus de 250 mg/kg.
2. Acrylamide:
Cette substance chimique se forme lors de la cuisson de denrées alimentaires riches en glucides comme les pommes de terre. Elle est notamment présente dans les féculents cuits à plus de 120o C, comme les röstis et les chips. Elle est considérée comme cancérigène probable pour l’être humain par l’Office fédéral de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires (OSAV).
3. Mépiquat
Cette substance se forme lors de la torréfaction du café. Plus les grains sont grillés, plus la quantité de mépiquat sera élevée. Selon l’Office allemand de la sécurité alimentaire, il est modérément toxique pour les mammifères.
Métaux lourds
Le laboratoire a traqué les traces d’aluminium, de plomb, de cadmium, de cuivre et de mercure. S’ils sont présents naturellement dans les sols, les engrais et les pesticides en contiennent également. Leur accumulation dans l’organisme peut avoir des effets nocifs au fil du temps et favoriser le cancer et la maladie d’Alzheimer.
Ochratoxine A
C’est une mycotoxine fortement toxique pour les reins et le foie. Elle est produite par une moisissure qu’on trouve parfois sur les fèves de café et qui n’est pas complètement éliminée lors de la torréfaction.
Hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP)
Ils peuvent se former pendant le séchage et la torréfaction des grains de café. Tous les échantillons testés en contenaient en faibles concentrations. Plusieurs HAP sont considérés comme cancérogènes pour l’homme par l’Autorité européenne de sécurité des aliments.