«Les prix affichés, les listes de prix et les catalogues doivent être faciles à consulter, aisément lisibles, clairs et sans ambiguïté.» Cette petite phrase, sortie de l’Ordonnance sur l’indication des prix (OIP), pourrait presque faire sourire. Presque… car ce texte, qui établit les règles de bonne conduite en matière d’affichage des prix, aussi bien dans les magasins qu’en vitrine ou sur Internet, fait, à l’évidence, office de vœu pieux.
A la rédaction de Bon à Savoir, nous recevons chaque semaine quantité de témoignages de lecteurs dénonçant des pratiques déloyales dans les commerces (lire «Rabais gonflés ou fictifs: la méfiance est de mise!»). Faux soldes, rabais mensongers, comparaisons trompeuses, multipacks plus chers qu’à l’unité…
Un coup d’œil à une récente enquête menée par le Secrétariat d’Etat à l’économie (Seco), durant deux mois, confirme l’ampleur de la tricherie. Sur 644 articles passés à la loupe, vendus en ligne, les rabais n’étaient pas correctement affichés une fois sur deux. Jusqu’à 56% dans l’électronique de loisirs. Quant aux prix indicatifs, mis en avant pour justifier des baisses, des manquements ont été constatés dans 73% des cas.
Pourquoi de tels abus? La réponse est peut-être à chercher du côté des sanctions encourues par les fraudeurs.
En premier lieu, la volonté délibérée de tromper n’est pratiquement jamais retenue par les Polices cantonales du commerce. On estime que l’ordonnance est compliquée… En l’occurrence, sur les 644 articles contrôlés, seules une dizaine de dénonciations ont été déposées. Pire, une enseigne ne respectant pas les règles se voit remettre une brochure d’information et bénéficie d’un délai pour se mettre en conformité avec la loi!
Si «l’erreur» n’est pas corrigée, la sanction peut alors atteindre jusqu’à 20 000 francs.
Il en va pourtant tout autrement dans la réalité. En août 2018, le magasin d’équipements sportifs Ochsner a été condamné à payer 4000 francs d’amende pour des soldes fictifs dans de nombreuses succursales à travers la Suisse. Une peine ridicule et, à l’évidence, insuffisante pour dissuader les tricheurs.
Le plus inquiétant pour les consommateurs, c’est que, loin de durcir les règles en la matière, on les «simplifie». Un exemple: une modification, entrée en vigueur en juillet dernier, autorise les commerçants à renvoyer les consommateurs sur un site internet pour consulter les indications obligatoires, jusque-là affichées directement sur les publicités.
Face à de tels manquements, à nous donc d’être vigilants et de faire respecter les règles, si les vendeurs les ignorent.
Pierre-Yves Muller
Rédacteur en chef