Si les salons et autres manifestations commerciales ont tendance, depuis quelque temps, à s’étaler sur toute l’année, septembre reste encore et toujours le mois des comptoirs. Le fer de lance, le Comptoir suisse de Lausanne, la grand-messe de la consommation réunit chaque année une foule de visiteurs à l’affût de bonnes affaires et des commerçants déterminés à leur vendre du rêve… Vraiment?
Après l’ivresse vient la migraine
Qui n’a en effet jamais cédé au discours engageant du vendeur sympa vantant les mérites d’un sommier de protection contre les ondes telluriques ou d’un autocuiseur à fréquences laser? Sur le moment, ces bons plans paraissent indispensables… Mais, une fois la fièvre du comptoir retombée, vient le sentiment d’avoir été quelque peu poussé à la consommation… D’où l’envie de faire, parfois, machine arrière et d’annuler cet achat réalisé sur un coup de tête. Et c’est là que le bât blesse. Car, en dehors de certaines situations précises prévues directement dans la loi, un contrat de vente, une fois conclu, ne peut généralement plus être révoqué.
Contrairement à une idée malheureusement toujours très répandue, il n’existe, dans l’absolu, pas de droit de rétractation de sept (ou huit ou dix) jours permettant au consommateur de revenir sur un achat. Seule exception: lorsque la conclusion du contrat a lieu dans le cadre de certaines formes de marketing direct, comme le démarchage à domicile. Il s’agit des fameux articles 40a et suivants du Code des obligations (CO). Or, ceux-ci excluent expressément de cette catégorie les emplettes faites sur des stands de marché ou de foire.
Les aficionados du comptoir ont donc tout intérêt à bien peser le pour et le contre avant de s’emballer pour un nouveau produit high-tech. Car, à moins que le vendeur, dans un élan de générosité, ne le prévoie spécifiquement dans ses conditions de vente, ils ne bénéficieront d’aucun droit de révocation. L’idée sous-jacente étant que le consommateur se rend à une foire commerciale de sa propre initiative et doit s’attendre à y être sollicité par les exposants. Autrement dit, pas de prise au dépourvu, pas de protection légale.
Crédit… dédit?
S’il n’est pas possible de revenir sur la vente, reste éventuellement l’alternative de révoquer le crédit. La loi sur le crédit à la consommation (LCC) permet en effet au consommateur de revenir sur son engagement dans les sept jours dès la réception du contrat. Attention, cette planche de salut concerne uniquement les contrats de crédit à la consommation soumis à la LCC, tels que les ventes par acomptes ou le leasing.
Cette option n’est pas dépourvue d’intérêt pratique, car ce type de contrat se rencontre fréquemment dans le cadre de foires où les stands de piscines, de cuisines et d’autres marchandises onéreuses ne sont pas rares. Il faut toutefois garder à l’esprit que seul l’octroi du crédit sera annulé. En revanche, l’acte d’achat en tant que tel subsistera, à moins bien entendu qu’il n’ait été initialement prévu que la vente dépendrait de l’octroi du crédit.
N’est pas défaut qui veut
Si même la LCC ne s’applique pas, il reste une ultime échappatoire pour le consommateur mécontent de son achat. Ainsi, l’article 205 CO permet de faire jouer la garantie pour les défauts et de résilier le contrat de vente. Mais il y a un mais: cette possibilité est ouverte uniquement en cas de défaut. Pas question donc d’invoquer la garantie, parce que, après réflexion, le canapé jaune canari si audacieux risque de l’être un peu trop pour le salon cossu de votre chalet d’alpage.
Ainsi, à moins de se trouver en présence d’une marchandise totalement défectueuse et irremplaçable – un changement d’avis ne constitue pas un défaut au sens de la loi –, mieux vaut ne pas trop compter sur son droit de révocation et réfléchir à deux fois avant de s’emballer sur un stand de foire.
Kim Vallon