«Qui casse, paie». C’est le principe de la responsabilité civile qui oblige à réparer le préjudice que l’on cause à un tiers. Lorsqu’une personne majeure, capable de discernement, blesse quelqu’un ou abîme quelque chose, elle est tenue de réparer les dégâts. Elle doit alors verser une somme correspondant au montant du dommage ou au tort moral subi à la partie lésée.
Maquettes en lambeaux
Mais lorsque c’est un enfant qui fait une bêtise, la situation se complique un peu. Que se passe-t-il lorsque des parents en visite chez un grand-oncle laissent leur bambin de 2 ans sans surveillance? S’il détruit malencontreusement la collection de maquettes de son tonton, il paraîtrait injuste que le dommage reste à la charge du propriétaire uniquement.
L’article 333 du Code civil (CC) a donc établi une responsabilité de la part du «chef de famille» pour les dégâts causés par ceux qui sont placés sous son autorité. Cela englobe les enfants, les personnes sous curatelle générale ainsi que celles et ceux qui sont atteints d’une déficience mentale ou de troubles psychiques. Dans le cas qui nous occupe, ce sera donc aux parents de dédommager le tonton pour ces maquettes démolies. Ils pourront faire appel à leur assurance responsabilité civile (RC) pour prendre les frais en charge.
Chef de famille à définir
Si la responsabilité des parents est présumée, ils ne seront pas pour autant systématiquement tenus d’assumer les frasques de junior. En effet, on estime que l’enfant qui est placé sous la garde d’un tiers pour une certaine durée passe sous l’autorité de celui-ci.
La durée du «placement» est importante ainsi que la fonction de la personne en charge de la surveillance. Ainsi, lorsqu’une baby-sitter est engagée pendant trois heures un samedi soir, elle n’est que l’auxiliaire des parents et, de fait, ne devient pas «chef de famille». Chaque situation doit donc être analysée finement pour déterminer si celui qui surveille temporairement les enfants devient responsable d’eux, au titre de l’article 333 CC.
En revanche, on admet qu’un adulte qui accueille un mineur durant quinze jours de vacances chez lui devient le «chef de famille». Si la petite Zoé passe quinze jours chez tata et dessine sur une tapisserie, on ne pourra pas se retourner contre ses parents. La fillette, placée chez sa tante, était sous sa responsabilité.
Il en va de même pour un adolescent qui va en colonie durant le mois de juillet. Il est alors placé sous la responsabilité des chefs de la colonie. A noter que la qualité de «chef de famille» peut être exercée par plusieurs personnes, voire parfois par une entité morale comme un hôpital ou un internat.
L’ado passe à la caisse
Le «chef de famille» peut néanmoins se dédouaner s’il peut prouver qu’il a surveillé les enfants avec toute l’attention qu’exigeait la situation. Il existe donc une porte de sortie pour les parents qui ont pris toutes les mesures nécessaires pour empêcher qu’un dommage ne se produise. Par exemple, si Kevin, 16 ans, est interdit de sortie et qu’il prend la poudre d’escampette durant la nuit pour aller crever les pneus de son professeur de math, les parents ne pourront pas être tenus comme responsables.
En l’occurrence, les parents avaient pris les mesures nécessaires pour empêcher un dommage de se produire. Et, comme c’était la première fois que Kevin se faisait la malle, on ne peut pas leur reprocher de ne pas avoir pris des mesures plus coercitives. En outre, l’adolescent est capable de discernement et «presque adulte». Il sera donc tenu personnellement responsable de ses actes et devra rembourser les pneus sur son argent de poche.
Sophie-Emilia Steinauer