Rainer Böhm s’était vu promettre un débit de 10 gigabits par seconde (Gbit/s), en raccordant sa petite entreprise à la fibre optique de Yallo, filiale de Sunrise. Constatant des défauts de connexion, il a pris des mesures et relevé un résultat de... 400 Mbit/s, soit 4% seulement de la performance annoncée. Devant son mécontentement, le service client de Sunrise a d’abord botté en touche: «La ligne est divisée en 32 raccordements sur le dernier kilomètre. Vous recevez plus de 200 Mbit par seconde et avez donc de la chance que la ligne ne soit pas complètement occupée.»
Des lignes sciemment surchargées
Rainer Böhm en a appelé à l’Ombudscom, organe de conciliation de la branche des télécommunications. Celui-ci lui donne raison et somme Yallo, soit de l’exonérer de tous les frais, soit de fournir la vitesse souhaitée, soit de le libérer du contrat. Un compromis sera finalement trouvé, même si Yallo affirme ne pas pouvoir augmenter la vitesse.
C’est une demi-vérité: Sunrise, comme toutes les entreprises de télécommunication, a bel et bien une influence sur la vitesse à laquelle sa clientèle peut surfer. L’opérateur peut déterminer à quel point il est prêt à charger les lignes Internet.
Nos confrères de K-Tipp ont compté, dans différentes centrales de fibre optique, le nombre de clients sur lesquels les entreprises répartissent la capacité Internet disponible. Quelques exemples: Sunrise a connecté pas moins de 640 clients à une capacité de 10 Gbit/s à Winterthour. Salt a même fait commuter 4000 clients sur une capacité de 40 Gbit/s à Genève.
Débit ralenti aux heures de pointe
«Avec de telles surcharges, les entreprises de télécommunication vont au-delà de ce qui est supportable», dénonce Fredy Künzler, directeur du fournisseur d’accès Init7 et spécialiste des réseaux. Chez Init7, 50 clients au maximum se partageraient une capacité de 10 Gbit/s.
Si les 4000 clients genevois de Salt se connectaient tous en même temps, le client individuel ne disposerait, d’un point de vue purement mathématique, que de 10 Mbit/s au lieu de 10 Gbit/s. Soit seulement un millième de la capacité. A peine de quoi streamer une vidéo. Fredy Künzler affirme que les clients peuvent le constater: «Aux heures de pointe, le dimanche soir, leur écran affiche parfois une bouillie de pixels au lieu de la qualité HD.»
Salt conteste que les clients reçoivent une qualité insuffisante: «Nous mesurons en permanence la consommation et les quelque 4000 clients de Genève n’ont besoin que de la moitié de la capacité offerte.» L’opérateur affirme fournir davantage de puissance lorsque c’est nécessaire.
Nous n’avons pas eu accès à l’infrastructure de Swisscom, qui admet aussi une «suroccupation» de ses lignes. Dans quelle mesure? L’entreprise ne le dira pas: «C’est un secret commercial.» Sunrise ne donne pas non plus de chiffres.
Une seule chose est claire: qui paie une connexion de 10 Gbit/s auprès d’un fournisseur d’accès suisse ne sait pas quelle puissance lui est effectivement fournie à la maison. Il ne faut donc pas se fier aux indications figurant dans les contrats.
Mirjam Fonti / ld
Comment défendre vos droits?
Si vous soupçonnez votre ligne Internet d’être trop lente, il est possible de réaliser un test par vous-même. Voici la marche à suivre:
- Débrancher et rebrancher tous les appareils du routeur, puis connecter son ordinateur au routeur via un câble Ethernet (car les mesures par WLAN sans fil ne sont pas fiables);
- Redémarrer l’ordinateur portable, ouvrir son navigateur pour accéder à Internet;
- Dans le champ de recherche du navigateur, taper www.fast.com. La mesure de la vitesse de la ligne commence.
Effectuez ces mesures à différentes heures du jour et de la nuit, réparties sur plusieurs jours de la semaine. Si les résultats sont inférieurs à ceux promis dans votre contrat, contactez votre fournisseur d’accès Internet.
Si vous ne trouvez pas d’accord avec celui-ci, adressez-vous à l’Ombudscom: 031 310 11 77 ou www.ombudscom.ch