Un simple téléphone suffit désormais pour se transformer en petite chaîne de télévision. Plusieurs applications permettent à chacun de partager en direct avec toute la planète ce qu’il filme avec son appareil mobile. La plus connue, Periscope, a été lancée il y a un peu plus d’une année. Elle a, par exemple, été utilisée en France durant les manifestations contre la «loi travail», pour dénoncer les violences policières. Il y a quelques mois, elle a été rejointe par la fonction «Live» de Facebook. Ces nouveaux outils posent cependant des problèmes de droit à l’image des personnes filmées. Ils divulguent, par ailleurs, de nombreuses informations personnelles sensibles. Tour du sujet en cinq questions.
1. En quoi Periscope ou Facebook Live sont différentes d’une simple vidéo?
Les smartphones sont capables de prendre des images fixes ou animées depuis de nombreuses années. Mais, jusqu’il y a peu, les réseaux mobiles n’étaient pas assez puissants pour télécharger sur internet une séquence enregistrée en direct. Désormais, c’est possible, et plusieurs applications de diffusion instantanée l’exploitent. Pour Francis Meier, porte-parole du préposé fédéral à la protection des données, cette particularité pose un nouveau problème: «La publication a lieu au moment même où l’on enregistre une scène. En raison de l’absence de délai entre les prises de vues et leur transmission sur le réseau, les individus filmés contre leur gré n’ont plus le temps de s’opposer à la diffusion de leur image.»
2. Le consentement est-il toujours nécessaire?
Pour utiliser ces applications, il est impératif de respecter les principes de la loi sur la protection des données (LPD). Cela signifie que les personnes capturées par l’objectif doivent pouvoir donner leur accord, à moins qu’il n’existe un intérêt prépondérant (sécurité, couverture journalistique d’une manifestation importante, etc.). Puisque la publication est, ici, immédiate, le consentement doit être donné avant que la caméra ne tourne.
Tout individu qui verrait son image diffusée sans sa permission et sans motif légitime peut intenter une action civile. Et espérer le versement d’un dédommagement, voire d’une indemnité pour tort moral.
3. Les enfants peuvent-ils utiliser ces applications?
La question doit être posée, car les mineurs sont nombreux sur Periscope. Pour Francis Meier, «les adolescents capables de discernement ont les mêmes droits que les adultes à l’autodétermination informationnelle». Ils peuvent donc accepter ou refuser la publication d’une vidéo dans laquelle ils apparaissent. Mais, pour les enfants, c’est le consentement de leur autorité parentale qui est nécessaire. Théoriquement, les plus jeunes ne devraient donc pas employer ces applications sans l’accord de leurs parents...
4. Comment gérer les paramètres de confidentialité?
Periscope propose deux modes: public et privé. Dans le second cas, seules une liste d’utilisateurs que l’on choisit a accès à notre live stream. Si l’on choisit néanmoins la diffusion publique, l’association Action Innocence recommande de désactiver la géolocalisation. Sur Facebook, on peut, comme pour n’importe quel autre statut, décider de le partager avec un groupe défini (ses amis, etc.) ou, au contraire, avec tout le monde.
5. Combien de temps sont stockées les vidéos?
A son lancement, Periscope avait la particularité de supprimer les séquences après 24 heures. Mais, depuis quelques mois, elles sont, par défaut, stockées indéfiniment. Pour éviter cela, il faut alors se rendre dans les paramètres pour activer l’autosuppression. Sur Facebook, il est aussi nécessaire de supprimer manuellement les prises de vues. Attention toutefois: chacun peut enregistrer les vidéos d’autrui et les poster ailleurs. Sur internet, on sait qu’il est difficile, voire impossible, d’effacer définitivement toute trace…
Bernard Utz