L’idée de l’assurance vie mixte est intéressante sur le papier: protéger ses proches contre le risque d’un décès prématuré, tout en épargnant de l’argent et en bénéficiant des avantages fiscaux du 3e pilier. Cette solution de placement permet de libérer un montant en cas de décès, mais aussi lorsqu’on survit au contrat. Ce qui n’est pas le cas avec une assurance décès classique. Mieux encore, le capital travaille, ce qui devrait permettre, à la fin de la durée contractuelle, de récupérer plus d’argent que ce qui a été investi.
Le problème est que seule une partie du capital est consacrée à l’épargne. Le reste sert à financer le risque de décès et de libération du paiement des primes (en cas d’accident ou de maladie entraînant une incapacité de gain) ainsi que les frais administratifs. Auparavant, lorsque les taux d’intérêt étaient encore intéressants, le rendement de la part d’épargne suffisait à couvrir ces frais et à permettre un gain, au terme du contrat. Or, ce rendement est insuffisant depuis plusieurs années. A la fin, l’assuré risque plutôt de perdre de l’argent que d’en gagner.
Taux négatif
Face à la faiblesse persistante des taux d’intérêt, les traditionnelles polices d’assurance vie mixte avec prime unique ont pratiquement disparu du marché. Sur la douzaine d’établissements que nous avons approchés, seuls quatre offrent encore ce genre de produits. Il s’agit de Helvetia, de Allianz Suisse, de Generali et de Raiffeisen (en partenariat avec Helvetia).
Nous leur avons soumis le scénario d’un homme de 50 ans, non-fumeur, pour un contrat de dix ans avec versement d’une prime unique de 100 000 fr. Résultat: plus aucun assureur ne garantit encore de toucher, à l’issue du contrat, une somme égale ou supérieure à l’investissement initial. Par exemple, Generali, avec Conforta Capital, verse seulement 68 293 fr. Le capital garanti en cas de décès est un peu plus élevé. Dans ce cas, seul Generali dépasse le montant versé, avec 101 530 fr. Le gain demeure toutefois extrêmement modeste pour un capital immobilisé pendant dix ans. Quant aux éventuels excédents, ils demeurent très hypothétiques.
Placements à risque
Il faut dès lors se tourner vers des produits liés à des fonds de placement pour espérer un gain plus substantiel. Attention toutefois, car on quitte alors la catégorie des placements sûrs pour s’aventurer dans celle, plus risquée, des investissements liés à l’évolution des marchés boursiers.
Première constatation, en cas de décès du preneur d’assurance pendant le contrat, ces polices versent aux bénéficiaires une somme plus intéressante que les produits traditionnels. Selon le scénario fixé (voir tableau), le capital garanti dépasse le versement initial dans tous les cas, à l’exception de l’assurance vie épargne Pax (98 915 fr.). La Mobilière est la plus généreuse avec son produit Invest Fund, qui garantit plus de 117 000 fr. en cas de décès.
Rendements incertains
En revanche, le montant obtenu à la fin du contrat est directement lié aux performances du ou des fonds de placement liés. Les assureurs proposent plusieurs stratégies en fonction du risque que chacun est disposé à prendre. Les plus prudents peuvent limiter la quote-part d’actions. Les meilleures perspectives de rendement impliquent cependant un risque plus élevé. Selon notre scénario, une hausse de 5% du fonds lié pendant la durée du contrat permet de réaliser une jolie plus-value, en récupérant entre 152 608 fr. et 145 690 fr. Helvetia Plan de performance offre le meilleur rendement (4,32%).
Reste que, un taux de 5% demeure un objectif ambitieux et difficilement atteignable. Le Groupe Mutuel projette ainsi une hausse maximum de 4%. Quant à La Bâloise, son scénario optimiste table sur un rendement de l’indice de 3%, qui permettrait de toucher 119 608 fr. à l’issue du contrat. Le hic, c’est que ces exemples reposent sur des hypothèses. Le montant des attributions d’excédents dépend du résultat d’exploitation annuel et peut donc subir des fluctuations considérables. Par conséquent, il est impossible aux assureurs de fournir des indications et des estimations fermes sur la future participation aux excédents.
Limiter les dégâts
Ce qu’il ne faut pas oublier, c’est que ces produits ne sont pas dépourvus de risques, même à long terme. Les investisseurs qui ont placé leurs économies dans un fonds entre 2000 et 2010, ont pu s’en rendre compte. Plusieurs options permettent toutefois de sauver les meubles en cas de krach boursier. On peut choisir, par exemple, une assurance liée à des fonds, mais avec capital garanti en cas de vie. Les rendements seront inférieurs, mais ces produits hybrides mettent à l’abri d’un effondrement boursier.
Dans le cas où le marché est fortement baissier à la fin du contrat, il est possible aussi de transférer son avoir sur un dépôt de titres et d’attendre une éventuelle embellie des marchés pour récupérer sa mise. Enfin, il ne faut pas hésiter non plus à changer le genre de fonds lié à sa police en cours de contrat, comme le proposent certains assureurs. On peut ainsi sécuriser son capital en basculant sur un plan d’investissement moins exposé.
Alexandre Beuchat
Retrouvez de nombreux conseils dans notre guide «Toutes vos assurances».
Séparer l’épargne et la couverture du risque
N’en déplaise aux assureurs, la couverture du risque et l’épargne ne font pas bon ménage. Les rendements sont faibles, tandis que les prestations des risques demeurent limitées. «D’expérience, il est plus intéressant de séparer l’épargne et le risque», souligne Roland Bron, directeur de VZ pour la Suisse romande. Autant opter pour une assurance décès, aussi appelée «assurance vie risque pur» ou «assurance risque de vie». Cette solution, qui pallie les lacunes de la prévoyance, est particulièrement indiquée pour les jeunes familles (lire «Un pari sur la vie»). Pour le versant épargne, on peut notamment opter pour des fonds indiciels (ETF), propose Roland Bron. A ses yeux, les assurances vie mixtes ne sont pas une bonne solution, surtout depuis la chute des taux d’intérêt. D’une part, les frais de gestion et la couverture du risque de décès entament le rendement et la transparence fait souvent défaut. De l’autre, le capital est immobilisé durant une longue période.