Les hauts-parleurs crachent It’s My Life de Bon Jovi, le groupe de rock américain, à 102,6 décibels. Tampons auriculaires en mousse jaune et rose vissés sur ses oreilles, Francesco, 11 ans, précise que le son est «très bon».
Et pourtant! Ces protections auditives, fréquemment distribuées lors des concerts et d’autres manifestations, ne protègent pas suffisamment les oreilles de l’adolescent, prévient Carlo Matzinger, expert en protection auditive à la Caisse nationale suisse d’assurance en cas d’accident (Suva). «Elles se positionnent mal dans le conduit auditif et trop de sons pénètrent dans l’oreille», prévient-il.
Afin de nous rendre compte de la qualité des protections auriculaires disponibles sur le marché, nous avons confié sept tampons en mousse ou à lamelles à six personnes: trois musiciens adultes et trois élèves musiciens âgés de 11 ans à 13 ans. Ils ont évalué le confort des produits et la qualité du son lors d’un test pratique. Les volontaires ont également testé de l’ouate ordinaire (voir tableau).
L’expert en protection auditive de la Suva a ensuite vérifié si les bouchons étaient bien adaptés aux oreilles des participants avant de les confier à un spécialiste de l’ouïe de la Suva également. Ce dernier a procédé à un test de laboratoire, reproduisant les conditions d’un concert rock et d’un concert classique, soumis à de fortes variations de volumes ainsi qu’à de nombreux aigus et graves.
Trop larges ou trop longs
Les résultats ne sont guère réjouissants. En effet, si les tampons testés obtiennent tous au minimum la mention «satisfaisant» pour les adultes, on ne peut pas en dire autant de la protection de l’ouïe des jeunes. En effet, seuls les tampons à lamelles ont passé la rampe: deux sont jugés «bon» et un autre «satisfaisant». Les protections en mousse se sont toutes révélées «peu satisfaisant». Certes, les instructions sont indiquées, mais les bouchons sont trop larges ou trop longs pour les oreilles étroites des adolescents. Ces derniers ne sont donc pas parvenus à les positionner correctement. Lorsque le son est de forte intensité, leurs oreilles sont par conséquent mal protégées.
Avec une note finale de 3.4, les tampons Ohropax Color arrivent bons derniers. Le fabricant ne comprend pas les résultats de notre test et revendique l’excellente protection de son produit. Il admet toutefois que l’insertion des tampons dans un conduit auditif étroit requiert une certaine habileté.
Mieux vaut également faire l’impasse sur l’ouate classique. La qualité du son est certes très bonne, mais il est toutefois impossible de déterminer le nombre de décibels filtrés.
Perte de la qualité du son
Les protections auditives doivent, certes, préserver l’ouïe, mais sans trop filtrer le son, selon le spécialiste de la Suva. Une insonorisation de 10 décibels suffit en général.
La plupart des tampons auriculaires testés filtrent trop les sons, particulièrement les aigus. C’est pourquoi la plupart de nos volontaires adultes ont évalué la qualité du son comme «satisfaisant» seulement. C’est notamment le cas du modèle vendu chez Migros. Le distributeur rejette les résultats de notre test et affirme que les protections auriculaires classiques sont parmi les plus vendues. Les tampons à lamelles avec filtre acoustique des marques Elacin ER 20 S et MusicSafe Pro ont en revanche été jugés «bon» sur ce point.
Quant aux bouchons de la marque Laser Lite, distribués gratuitement durant certains concerts, ils offrent une protection jugée «peu satisfaisant» par les adolescents et tout juste «satisfaisant» par un adulte. Interpellé, Audio Protect reconnaît que son produit péjore fortement l’écoute. Le fabricant commercialise également les tampons de la marque Elacin Er 20 S que les jeunes ont eu des difficultés à insérer correctement. Il recommande donc de les humecter avant l’utilisation. Hansaplast et Artifit se sont, quant à eux, refusés à tout commentaire.
Ines Vogel / Chantal Guyon
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